À l’occasion du premier closing du fonds II de Lauxera Capital Partners, à hauteur de 300 millions d’euros, l’un de ses co-fondateurs, Pierre Moustial, ancien CEO d’Urgo et de Fournier Pharma, revient sur les objectifs poursuivis à travers ce nouveau véhicule et dresse un état des lieux du secteur de la santé.

Décideurs. Quels sont les objectifs avec le premier closing de votre fonds II ?

Pierre Moustial. Notre fonds I, d’une taille de 262M€, a été déployé en totalité en juillet 2024, après une prise de participation dans 12 entreprises en growth et growth-buyout dans la healthtech. L’objectif de ce deuxième cru est de poursuivre cette stratégie d’investissement. La grande majorité de nos LPs ont réinvesti à travers cette seconde étape. Ils valident ainsi le travail réalisé depuis le closing du premier fonds en janvier 2021. C’est pour nous un bon signal qui confirme que nous avons su tenir nos promesses auprès de nos investisseurs.

Nous avons un dealflow déjà très fourni pour le fonds II, avec des opportunités très intéressantes qui ont été identifiées, en France en Europe. Elles visent des start-up et des scale-up afin de les aider à passer le cap déterminant du passage d’une entreprise prometteuse à leader mondial dans leur domaine. En tant que société de gestion transatlantique présente à Paris et San Francisco, et grâce à notre connaissance des marchés américain et européen de la santé, une des forces de Lauxera est de permettre à nos participations d’atteindre leur taille critique à l’international.

Avec ce nouveau fonds, nous visons entre douze et quinze nouveaux investissements dans des entreprises innovantes ayant déjà fait leur preuve. À titre d’exemple, le Suédois Natural Cycles, déjà présent outre-Atlantique, qui fait partie de notre fonds I, a développé la première application de contrôle des naissances au monde avec un algorithme utilisant l’intelligence artificielle. Grâce à la température corporelle, cet outil peut déterminer l’état de fertilité quotidien de chaque utilisatrice. Cette opération montre l’étendue de nos compétences pour permettre à une entreprise d’entrer sur le marché américain ou alors d’asseoir son positionnement si elle y est déjà présente.

Quels domaines de la santé seront particulièrement ciblés par vos investissements ?

Nous sommes intéressés par les technologies très innovantes, notamment celles utilisées en bloc opératoire au cours de chirurgie de pointe. Bien sûr, les données et l’intelligence artificielle attirent aussi notre convoitise. L’IA est le terme à la mode du moment – ce dont je me méfie –, mais c’est un outil qui, par sa capacité d’analyse, peut se rendre indispensable pour valider et faciliter le développement d’autres innovations.

"À l’instar de notre premier véhicule, les dispositifs médicaux à destination des femmes restent une priorité", Pierre Moustial

À l’instar de notre premier véhicule, les dispositifs médicaux à destination des femmes restent une priorité. Nous continuons à être attentifs aux innovations en la matière. Enfin, nous sommes très préoccupés par l’investissement à impact mais d’une manière sensiblement différente d’autres fonds. Aujourd’hui, nous savons que 90% des études cliniques qui sont menées dans la santé vont échouer, mais celles qui vont se concrétiser donneront lieu à des innovations incroyables pour lutter contre des formes graves de cancers, contre la maladie de Parkinson ou encore celle d’Alzheimer. Mais c’est l’accessibilité aux traitements qui sera le grand verrou à leur diffusion massive. Chez Lauxera, nous visons des pépites qui cherchent à réduire les coûts de production de ces traitements révolutionnaires pour faciliter leur exploitation à l’avenir. C’est le nerf de la guerre de ces dix prochaines années.

Pour certains, la santé connait en ce moment une baisse d’attractivité sur les marchés financiers, quelles perspectives dressez-vous pour le secteur à court et moyen terme ?

À mon sens, il y a deux marchés de la santé. Les entreprises très visibles, qui sont très rentables, continuent à attirer de nombreux financements et celles en difficulté ou qui n’ont pas encore atteint leur seuil de rentabilité pour qui la situation est plus complexe.

Cependant, il y a toujours des liquidités et le fait d’être un fonds spécialisé fait une grande différence. Nos critères ne sont pas uniquement financiers, nous nous intéressons aussi à la qualité du produit, à ses barrières à l’entrée ainsi qu’au management. Dans une période de financement plus tendue, cela va aussi rassurer les entrepreneurs qui développent des innovations très poussées, qui ne sont pas compréhensibles sans être un expert d’un domaine très précis de la santé. Notre force se situe aussi dans le réseau d’experts que nous mettons à disposition de ces dirigeants et qui vont épauler nos participations pour faciliter leur expansion.

Propos recueillis par Tom Laufenburger


Personnes citées

Pierre Moustial

Pierre Moustial

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail

GUIDE ET CLASSEMENTS

> Guide 2024