Rien ne s’oppose à un projet d’expatriation, si ce n’est une fiscalité complexe. D’où l’intérêt d’être bien accompagné pour ne pas y laisser ses plumes.

Qui n’a jamais rêvé de tout plaquer pour partir vivre à l’étranger ? Style de vie, raisons personnelles, vie culturelle, perspectives professionnelles ou encore optimisation fiscale… il existe autant de motifs d’expatriation que d’expatriés. En 2023, pas moins de 2,5 millions de Français[1] étaient installés à l’étranger, un chiffre en légère augmentation par rapport à l’année précédente. L’Europe, les Caraïbes ou encore le Moyen-Orient sont quelques-unes des destinations les plus prisées.

Réintroduite en 2011 sous la présidence de Nicolas Sarkozy, l’exit tax est instaurée afin de limiter l’évasion fiscale. Plus concrètement, ce dispositif consiste à imposer les plus-values latentes au moment du transfert de la résidence fiscale en dehors de la France vers un pays de l’Union européenne. Sous quelques conditions – avoir un patrimoine global supérieur à 800 000 euros et/ou détenir des parts d’une société, l’idée étant de faciliter ces mouvements de vie.

Un impôt qui fait débat

"Lorsqu’un client privé souhaite transférer sa résidence fiscale à l’étranger, il doit en principe payer l’impôt sur la plus-value latente, sauf dans le cas où il bénéficierait d’un sursis de paiement, sous certaines conditions" précise Nicolas Cys, associé chez La Tour International. Dégrèvement perçu sous l’effet du temps grâce à un délai accordé selon le montant des titres détenus par le contribuable, cet impôt est souvent pris à partie par les politiques. Connu pour avoir la réputation d’être un impôt n’ayant pas vocation à être payé mais qui se gère, l’exit tax préoccupe les expatriés. Autrement dit, si un contribuable quitte la France avec 10 millions d’euros de titres et une plus-value latente de 5 millions d’euros qu’il vendrait dans les cinq années suivant son déménagement, l’impôt sur la plus-value reviendrait à l’État français. Mais l’État perd ce droit à la fin de ladite période – qu’il est d’ailleurs question d’allonger dans certains débats politiques. Bien que cela ne complique pas l’expatriation, cette taxe peut bel et bien freiner les projets de certaines familles et les rendre moins mobiles.

Au cœur des débats à l’occasion du projet de loi de finances pour 2025, son report ouvre de nouvelles perspectives pour les clients privés qui pourraient bénéficier de la flat tax, dans un contexte où un alourdissement du taux d’imposition des plus-values se fait craindre.

Pas de passe-droit pour la Suisse

L’exit tax repose avant tout sur un élément clé : la destination. Une personne qui transférerait sa résidence fiscale au sein d’un pays membre de l’UE ou ayant conclu une convention d’assistance administrative au recouvrement avec la France bénéficierait automatiquement d’un sursis de paiement. Ainsi, elle ne paiera pas l’impôt tant qu’elle ne cèdera pas les titres détenus au moment de l’expatriation dans un délai de deux ou cinq ans – selon la situation –, sans avoir à fournir de garanties. Pourquoi ? Simplement car la jurisprudence constitutionnelle de l’ancien régime de l’exit tax implique que la France ne peut pas mettre de barrières à un contribuable souhaitant s’expatrier : ce serait contraire au droit de l’UE.

Mais qu’en est-il des pays non cités par ce dispositif ? Prenons le cas de la Suisse. Un résident fiscal français qui s’y installerait pourrait bénéficier d’un sursis de paiement, à condition de produire des garanties à l’État français. Nantissement sur les titres d’une société française ou hypothèque d’un bien immobilier, la question des garanties est le point d’achoppement que redoute tout avocat fiscaliste.

"Nous accompagnons un client dans le transfert de sa résidence fiscale en Suisse depuis près d’un an. C’est un projet qui s’anticipe car les points de vigilance sont nombreux. À titre de garantie, il va offrir une hypothèque sur un bien immobilier à Paris qu’il mettra en location. Si éventuellement cela ne suffisait pas, il proposera de nantir un contrat d’assurance-vie de droit français en guise de double garantie", explique Nicolas Cys. Attention toutefois à prendre en compte la valorisation des actifs. Si certaines garanties y sont sensibles, elles sont rares, mais restent un élément délicat sur lequel l’administration fiscale est attentive. Par ailleurs, dans le droit qui s’applique, l’hypothèque est levée en cas d’impatriation vers la France avant la fin des cinq ans. Cas particulier : si le client souhaite finalement s’installer en Italie ou dans tout autre État membre de l’UE, les garanties pourront être annulées.  

Fun fact : l’Île Maurice ayant conclu une convention fiscale comprenant une double clause administrative et de recouvrement avec la France, vous pouvez vous y installer en ne craignant que les coups de soleil !

Marine Fleury

 

[1] diplomatie.gouv.fr

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