Certains petits défauts ou différences de valeurs viennent s’immiscer dans la relation manager-collaborateur. Des irritants qui, s’ils ne sont pas traités comme il se doit, peuvent nuire à l’efficacité de l’équipe. Tour d’horizon des solutions.

Cette situation nous est arrivée à tous. Dans une équipe, le comportement d’une personne voire une personne dans sa globalité vous agace fortement. Les options pour faire face à cette incompatibilité sont nombreuses. Mettre de l’eau dans son vin en fait partie mais, après tout, est-on obligé d’avoir de la connivence avec tout le monde ? Là où le bât blesse, c’est lorsque vous êtes le chef de cette équipe. Le professionnel devant primer sur le personnel, comment faire pour manager les personnes avec qui nous n’avons pas d’atomes crochus, voire que nous n’aimons pas ?

Le bon grain et l’ivraie

"Même si on développe des affinités au travail et qu’elles participent à le rendre agréable, on n’est pas là pour se faire des amis, rappelle Frédéric Fougerat, auteur de L’élégance n’est pas une option, questions de management. Ce qui compte le plus, c’est la complicité professionnelle, de disposer des mêmes codes pour travailler." Le président de Tenkan Paris raconte : "Il m’est arrivé d’employer des personnes avec lesquelles je n’avais pas de complicité personnelle et qu’il m’était désagréable d’avoir en face de moi. Pourtant, elles étaient très pros et cela suffisait à créer un lien pour travailler."

Une fois dit qu’il est nécessaire de rester dans son rôle, comment faire face à cette problématique ? Tout d’abord, il convient de se demander pourquoi un collaborateur déclenche chez nous une émotion négative. "Il y a des personnes avec qui le ‘fit’ passe immédiatement et d’autres non, pour des raisons rationnelles ou des raisons irrationnelles", constate Frédéric Fougerat. Les raisons rationnelles ? Les personnes toxiques qu’il est important d’écarter de l’équipe. "C’est un fléau contre lequel il faut se battre", insiste Anaïs Georgelin, fondatrice et CEO de SomanyWays.

Introspection

Hormis ces profils nocifs, la majorité des tensions entre les personnes dans une entreprise relèvent davantage de l’incompatibilité d’humeur. Au manager de s’interroger sur leurs causes. "Première étape, faire le point sur vous", explique Anaïs Georgelin. Elle ajoute : "De toute façon, quand quelque chose nous gêne en l’autre, cela dit quelque chose de nous." Afin de comprendre ce principe, Anaïs Georgelin propose d’utiliser le quadrant d'Ofman, un outil permettant de "montrer que nos allergies sont les excès des défauts de nos qualités".

"Le rôle managérial vous met toujours face à vos zones d’ombre"

Concrètement, qu’est-ce que cela signifie ? Vous disposez d’une qualité comme l’humilité, par exemple. Poussée à l’excès, celle-ci devient un piège. Dans le cas de l’humilité, l’excès consiste à s’effacer. L’opposé positif de cette qualité : l’assertivité. Son excès ? Écraser les autres. Ainsi, quelqu’un d’assertif peut nous irriter et le problème n’est pas tellement lui mais plutôt nous. "Cet outil nous apprend beaucoup sur nos challenges et nos allergies. Comprendre ce qui se joue donne un intérêt à progresser sur certains points et donc à trouver du positif dans le fait de devoir manager quelqu’un que l’on n’aime pas."

Communiquer, toujours

Une fois le constat dressé, il faut communiquer. "Nous militons pour travailler sur la relation managériale", explique Anaïs Georgelin. Le manager formalise un feedback le plus factuel possible en expliquant comment il vit ce trait de caractère et il doit s’interroger avec le collaborateur sur la manière de construire autour. "Souvent, on préfère éviter le conflit alors que ce sont les petits cailloux qui finissent par pousser les gens à partir. Le bon sens doit primer. Il est rare que les collaborateurs refusent de discuter."

Si le managé s’avère trop nonchalant, au manager de lui faire comprendre que son poste nécessite de montrer davantage de proactivité. À lui aussi d’expliquer à une personne qui rit trop fort dans l’open space qu’elle peut déranger parfois les autres. "Ce n’est pas à la personnalité que l’on touche mais à des postures attendues sur le poste", insiste Anaïs Georgelin. En revanche, s’il s’agit aussi d’un peu de jalousie vis-à-vis de la joie de vivre du collaborateur, alors au manager de travailler sur lui. "Le rôle managérial vous met toujours face à vos zones d’ombre", relève Anaïs Georgelin.

Seniors vs juniors

Certains décalages de générations sont susceptibles aussi d’irriter les dirigeants et de les empêcher de créer du lien avec les plus jeunes. L’une des réponses consiste à s’ouvrir à des profils différents du sien, ce qui nécessite de pouvoir soi-même constituer son équipe. "Il y a un travers très important dans lequel les managers peuvent tomber : trop recruter dans son cercle. La diversité est un choix politique nécessaire. Cela se décide de s’entourer de jeunes, de seniors, de femmes, de différentes origines ethniques", martèle Frédéric Fougerat.

Lorsque les attentes des jeunes ne nous semblent pas correspondre aux nôtres ou lorsqu’ils semblent irrévérencieux, comment gérer le sentiment que cela génère chez nous ? "Un manager n’a pas besoin d’une cour autour de lui mais de personnes compétentes qui lui disent les choses, souligne Frédéric Fougerat. Ce qui n’empêche pas que le collaborateur doive garder en tête qu’à la fin c’est le patron qui décide."

Questions de valeurs

Parmi les points de divergence entre les jeunes et les seniors : le sens donné à la valeur travail. Si les jeunes ont encore le goût du travail, nombreux sont ceux qui estiment que celui-ci n’est pas une fin en soi mais un moyen, contrairement à une partie des générations antérieures. Ce qui peut créer des frictions.

"La ligne parfois la plus difficile à aborder, qui n’est ni un petit désagrément de personnalité ni de l’ordre du toxique, c’est l’écart de valeurs"

Plus globalement, "la ligne parfois la plus difficile à aborder, qui n’est ni un petit désagrément de personnalité ni de l’ordre du toxique, c’est l’écart de valeurs", analyse Anaïs Georgelin. Un manager très porté sur le collectif va avoir du mal à supporter un collaborateur individualiste. "Les feedbacks ne changeront pas quelque chose de très ancré qu’il sera difficile de détricoter." D’où l’intérêt de ne pas négliger les cas pratiques lors des entretiens pour mettre à jour ces incompatibilités.

Apprendre à se connaître

Dans la plupart des cas, l’une des clés pour débloquer les situations est de passer du temps avec les gens afin d’apprendre à les apprécier. Pour cela, il convient d’éviter ce biais qui nous pousse à aller davantage vers les personnes que l’on aime côtoyer. "Passer du temps ensemble, c’est l’opportunité de découvrir les qualités des personnes dont on exècre les défauts", estime Anaïs Georgelin.

En faisant un pas de côté, on se donne la possibilité de se rendre compte que notre vision s’avère déformée. Par exemple, en échangeant, un manager pourrait comprendre que le collaborateur vit des choses difficiles qui expliqueraient l’attitude qu’il a du mal à supporter. "L’une des qualités indispensables pour un manager, c’est l’empathie, résume Frédéric Fougerat. Si vous n’avez pas le goût des autres, des qualités d’observation et d’écoute, c’est un problème."

Réponse collective

Autre possibilité, travailler collectivement à la résolution des frictions entre deux personnes. "S’offrir des moments de connaissance de soi en équipe, et pas uniquement en binôme, peut faire bouger les lignes. En ajustant le système, on arrive à ce que de nouvelles relations se tissent dans celui-ci", estime Anaïs Georgelin. "Je veille à célébrer toutes les réussites, qui sont généralement collectives, et certaines fêtes, raconte Frédéric Fougerat. Ces moments de lien participent à la cohésion de l’équipe, à fédérer les gens. C’est dans ces occasions que les personnes se confient et créent de la complicité professionnelle."

S’il est parfois compliqué de manager des personnes avec qui on n’a pas d’atomes crochus, l’inverse est aussi vrai. Comment rester dans son rôle quand il faut recadrer un collaborateur avec qui on a l’habitude de plaisanter ou de prendre des verres ? Pas simple !

Olivia Vignaud

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