Mercredi 27 avril, le pénaliste lillois est devenu l’avocat le plus médiatique de France.

Voix grave, cheveux plaqués, Frank Berton squatte journaux, radios et autres plateaux de télévision depuis plusieurs jours. À 53 ans, l’avocat s’apprête à défendre le principal suspect toujours en vie des attentats du 13 novembre.

 

« Il doit être jugé pour ce qu’il a fait »

 

« J’ai hésité. D’abord, j’ai voulu le rencontrer », reconnaît Frank Berton, précisant qu’il n’aurait pas défendu Salah Abdeslam s’il avait choisi de se murer dans le silence. Le premier contact avec son client remonte aux jours précédents son transfèrement vers la France. L’avocat décrit alors un homme « effondré », qui prendra ses responsabilités. « Ce garçon doit être jugé pour ce qu’il a fait (…) pas pour ce qu’il représente parce qu’il est le dernier survivant et qu’on lui ferait porter des faits et gestes qui ne sont pas les siens », explique Frank Berton, qui a la réputation de s’intéresser à la nature humaine plus qu’à la morale. Un point du vue qui a du mal à passer dans l’opinion publique. Même s’il a rappelé qu’il défendait l’homme et pas la cause, Frank Berton fait déjà l’objet des critiques les plus acerbes. « On a l’impression que je mène un combat qui n’a pas de sens, pas d’utilité, avoue-t-il. Mais la justice c’est comprendre, nous ne sommes pas dans un État totalitaire. » Du côté de la profession, le lillois semble néanmoins faire l’unanimité : « C’est un confrère qui n’a plus rien à prouver et que des coups à prendre dans cette affaire », twittait Maître Eolas.

 

Expliquer et comprendre

 

Loin de l’air glacial que pouvait dégager Jacques Vergès au moment de défendre Klaus Barbie, Frank Berton fait preuve d’empathie « Je comprends un discours de souffrance, de douleur [des familles des victimes]… qui peut être insensible à ça ? La justice se rend quand on comprend les choses ». Expliquer, comprendre, analyser… c’est là tout l’intérêt de sa mission, « sinon le procès ne sera pas utile aux victimes ». Quant à son client, si l’avocat reconnaît défendre un homme « odieux », il est pour lui important  d’écrire une page, « sinon tout ce drame, ce sang coulé n’a pas de sens ». Quoi qu’il en soit, dans cette affaire, l’homme ne pourra gagner qu’en notoriété, puisqu’il ne sera rémunéré par l’État qu’au titre de l’aide juridictionnelle. Cet habitué des dossiers sensibles (Outreau, Florence Cassez), jure en tout cas d’exercer son métier avec « humanité, dignité et humilité ». Seule la suite de l’affaire pourra le confirmer.

 

 

Capucine Coquand

@CapucineCoquand

 

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