Admirer ses équipes, voilà le secret du leadership selon Siham Vidard, présidente du groupe de certification SGS ICS. Une dirigeante dont les succès se forgent tant dans l’exigence et l’empathie, qu’au fil de belles rencontres.
Siham Vidard, l’énergie solaire
Rare rayon de soleil entre les averses de juin, Siham Vidard s’installe dans une petite salle du Pavillon d’Armenonville à Paris. À voix basse, pour ne pas déranger les autres dirigeants attablés, mais ferme, la présidente de la filière de certification SGS ICS lance : "La force de la meute vient du loup. Et la force du loup vient de la meute."
Sur des rails
Cette devise que l’on doit à Rudyard Kipling s’incarne très tôt dans la carrière de cette ingénieure. Chez SNCF, ni son caractère analytique ni sa capacité d’empathie ne passent inaperçus. À vingt-quatre ans, elle emmène des équipes d’une trentaine, puis d’une cinquantaine de personnes. Parmi ses repères, Hubert Joly, auteur de L'entreprise, une affaire de cœur, les théories de Simon Sinek, pour qui un leader "doit créer un environnement propice à l’épanouissement des équipes" à l’instar de Matthieu Chabanel, alors directeur général adjoint auprès de l’acteur ferroviaire français. Elle le rencontre sur le terrain : "Il venait de rejoindre l’entreprise, jeune, à un poste de responsabilité et pourtant savait rester accessible." À ses yeux, un leader humble et exemplaire, qui éclaire au quotidien.
Deux équipes, une force
Aujourd’hui, la présidente de SGS ICS avance sur tous les fronts. Toujours en équipe. "Vous êtes tous branchés à moi", leur confie-t-elle. "Quand quelqu’un flanche, pour une raison pro ou perso, je les appelle. Je les booste pour qu’ils repartent. Et inversement." Une attention qu’elle porte à ses deux équipes, "une que je dirige et l’autre dont je fais partie."
L’une est pilotée par Alain Guy, président de SGS France et l’autre par Thomas Juin, son coach de rugby. Des mentors brillants, à l’écoute, dont la perspicacité pousse les autres sur des terrains qui les font grandir. "Thomas, s’il est infiniment exigeant, nous fait vivre des moments forts et tellement positifs." Des méthodes porteuses de succès qui gagneraient à être dupliquées dans le business. "La bonne entente de l’équipe influe directement sur les résultats." Selon Siham Vidard, exigence et bienveillance s’alignent vers un même but pour "que l’équipe ait des étoiles dans les yeux. C’est pour ce sentiment d’accomplissement que je me décarcasse." Pari tenu, lorsqu’elle dévoile les résultats annuels, avec une croissance de 30 % qu’elle attribue aux personnes de son équipe.
"La bonne entente de l’équipe influe directement sur les résultats"
Valeurs de l’ovalie
Passionnée de rugby depuis vingt-ans, elle en apprécie le contact, l’effort et la rigueur du jeu en extérieur. Pour elle, l’équilibre de chacun repose sur la famille, le travail, mais aussi le soin que chacun s’accorde à soi-même, notamment à travers le sport. Sans concession, elle déclare que dire qu’on n’a "pas-le-temps" n’est qu’une excuse. "On se dépasse intellectuellement quand on est bien dans sa peau, lorsqu’on a généré de l’adrénaline." Cette ardeur se cristallise dans les trois créneaux hebdomadaires qu’elle réserve au sport de contact, résonne à travers les encouragements de son fils, Louis, lors de passes complexes et se concrétise par une victoire à la coupe de Touch rugby en Île-de-France. Un espoir "en chandelle" vers la finale du championnat de France, le 29 juin prochain.
Intensité sublimée
Tête et talons hauts, Siham Vidard fraye son chemin. Elle adore "ne pas savoir où on sera demain, si ce n’est qu’on sera ailleurs." Pour cette fan de Kobe Bryant, l’agilité se travaille, littéralement. "Au-delà du jeu d’équipe, la discipline de Kobe était exemplaire." Elle cultive cet effort délibéré. "Il est rare que je déconnecte complètement." Cette lève-tôt accueille les clignotements de son portable d’un haussement d’épaule : "Mais je vérifie les heures de déconnexion des autres", ou encore s’ils embarquent leur sac de sport au déjeuner. "Je dois me donner à fond, sinon je ne m’emballe pas ! " Une intensité en écho avec un de ses films fétiches, le Loup de Wall Street. "Ces traders, au-delà de leurs fourberies et excès, sont des acharnés de travail hyper brillants qui réussissent dans une niche."
Entre deux e-mails, elle déclare, "notre métier, c’est l’humain." L’affirmation peut faire sourciller puisque les certifications s’écrivent en normes ISO chiffrées. Celles là-mêmes "qui participent à la sécurité des personnes." Dans sa carrière, la présidente de SGS ICS a su choisir des entreprises qui combinent "enjeux souverains" et "dévouement aux autres." Pour celle qui a grandi en bord de mer à Casablanca, "l’odeur d’iode est euphorisante" et les postes "qui nous consument mais qui nous nourrissent" le sont tout autant.
Premiers soutiens
L’entretien se poursuit en terrasse. D’un ton léger, elle évoque "la joie [trouvée] dans le dépassement de ce qu’on pense possible". Un retournement qui s’opère quelques années auparavant, alors que, dirigeante de Scopelec et maman d’un petit garçon de quatre ans, elle parvient à exceller dans l’executive MBA de l’ESCP. "J’ai découvert que j’étais capable de bien plus." La prise de conscience sur ses capacités lui donne envie d’ailleurs. Le courage de franchir le pas, elle l’attribue aux siens.
"Rien n’est inatteignable en travaillant dur et en s’entourant des bonnes personnes"
Songeuse, Siham lève une flûte pétillante. "Rien n’est inatteignable en travaillant dur et en s’entourant des bonnes personnes." L’une d’elles n’est autre que Muriel Benitah. Dès leur rencontre, la fondatrice du salon de l’innovation en santé MedInTechs lui demande de prendre la parole lors d’une table ronde, la première devant un public professionnel. Depuis, elle enchaîne les conférences. "Une personne qui croit en nous peut nous faire dépasser toutes nos limites." Sur ce thème cher, Siham Vidard adapte l’adage, "Quel est le plus important, la destination ou le voyage ?" À quoi elle répond : "La compagnie."
Alexandra Bui