Ancienne dirigeante du Women’s Forum, créatrice d’entreprises accomplie, Emmanuelle Brizay a investi dans une quarantaine de start-up. Basée à Londres, elle aime accompagner au quotidien les fondateurs.

Alors qu’elle n’était qu’en deuxième année à HEC, un ami lui propose de monter une boîte. Le sujet, les financeurs, elle ne les connaît pas mais répond aussitôt oui. Elle, c’est Emmanuelle Brizay, une entrepreneuse née qui soutient aujourd’hui les fondateurs de start-up. Avec son camarade, elle met sur pied un site internet pour aider les entreprises à recruter les étudiants de grandes écoles. "À l’époque je faisais partie de la première promotion avec un e-mail HEC, raconte l’ex-dirigeante de Skilia. Les entreprises recrutaient soit en mettant une annonce sur un mur au fond d’un couloir, soit en envoyant à tous les élèves le même mail. Nous leur avons permis de mieux cibler les candidats."

Faire soi-même

En 2001, la bulle internet explose. L’entreprise pivote pour devenir une société de communication dans les RH et les produits spécialisés avant d’être vendue en 2004. Emmanuelle Brizay en reste responsable com’ RH mais ne se voit pas y faire toute sa carrière. Elle rejoint le conseil en stratégie en attendant de trouver sa voie. Chez WMI Consulting, elle travaille pour Thales ou le PSG dans une ambiance entrepreneuriale et formatrice. "Il n’empêche que j’avais très envie de faire moi-même." Elle rejoint ensuite Orange pour y lancer la plateforme de musique et faire converger le fixe, le mobile et internet, ou encore mettre en place le 118 218.

Emmanuelle Brizay intègre en 2008 le Women’s Forum, dont elle devient DG et associée. À son arrivée, elle redresse les comptes de l’organisation internationale mais c’était sans compter quelques semaines plus tard la crise de Lehman Brothers et d’AIG, tous deux liés financièrement à ce forum. La sororité ? "Je n’aime pas trop cela. Je ne me définirais pas comme féministe car je trouve qu’en se mettant dans des cases on tombe vite dans la caricature et la polarisation." Après la vente du Women’s Forum à Publicis, elle rejoint Cordélia de Castellane (Dior) puis devient directrice de la marque de vêtements Petite Mendigote.

L’expérience Panoply City

En 2016, Emmanuelle Brizay lance une entreprise de location de vêtements. "Je n’étais pas là pour la mode mais parce que je m’intéressais aux changements de comportements de consommation", explique celle qui précise toutefois que "bien s’habiller contribue à asseoir le leadership". Panoply City propose à ses clients des solutions clés en main. Problème : "Il est difficile de faire payer aux consommateurs le prix réel des services tels que livraison, collecte et dry cleaning à une époque où nous sommes habitués à ce qu’ils soient faussement gratuits. De façon plus générale, nous sommes déresponsabilisés et ne nous rendons pas compte du coût réel d’une scolarité ou de la santé qui sont hautement subventionnées même dans le privé."

"C’est difficile de créer un flux de deals de qualité"

Alors que Panoply City s’apprête à boucler une levée de fonds, Emmanuelle Brizay décide en 2019 de fermer l’entreprise, estimant qu’il est de sa responsabilité d’assumer le fait qu’elle n’arrivera pas à l’emmener là où elle veut. Celle qui finançait depuis 2012 des start-up avec son mari, banquier en M&A, décide de se consacrer à cette activité à temps plein depuis Londres. "C’est difficile de créer un flux de deals de qualité. Il faut du temps pour instruire les dossiers et comprendre le fonctionnement de l’équipe. Les business angels pèchent parfois par trop de confiance dans les infos que certaines candidates mettent en avant sans creuser."

Valeurs communes

Pas de domaine de prédilection pour le couple, qui a investi dans une quarantaine d’entreprises, de la food avec Big Mama, à la santé en passant par la fintech. "Sans parler d’impact, chaque projet est porteur de valeurs et contribue à un certain modèle de société, il y a une responsabilité des investisseurs."

Emmanuelle Brizay fait partie des investisseurs aimant accompagner au quotidien ses jeunes pousses. "Les entrepreneurs devraient toujours identifier un sujet commun avec chaque personne qui vient dans un tour de table et ne pas avoir peur de parler de leurs problèmes." Pour la suite, Emmanuelle Brizay ne ferme pas la porte à l’idée de retourner de l’autre côté de la barrière, peut-être pour aider les séniors et les gens qui s’en occupent au quotidien. Mais, elle le sait, entreprendre nécessite beaucoup d’énergie. En entretien, en tout cas, elle n’en manque pas.

Olivia Vignaud

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