Cadres, quelle vie après la crise ?
Selon les sources, entre un tiers et un quart des salariés auraient pratiqué le télétravail à plein temps pendant le confinement. Parmi ces millions de personnes figuraient de nombreux cadres qui, contrairement aux catégories les plus populaires, ont pu conserver leur travail et l’exercer confortablement depuis leur domicile.
Une catégorie à part
L’augmentation croissante du nombre de cadres au sein de la population active n’est sans doute pas étrangère à l’explosion inédite du télétravail au plus fort de la crise. En effet, dans une économie de plus en plus tertiarisée, les rangs des cadres s’étoffent d’année en année. 5,2 millions de Français possédaient ainsi ce statut en 2019.
La figure du cadre puisse ses racines loin dans l’histoire française. Émergente dans les années 1930, elle s’est véritablement structurée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Ce statut visait, dans un contexte d’organisation du travail fordiste fortement hiérarchisée, à distinguer les cadres tant des ouvriers et des employés que des employeurs. Or, aujourd’hui, les traits d’une telle spécificité tendent largement à s’estomper. De moins en moins associée à des responsabilités d’encadrement ou de supervision, "la figure du cadre hiérarchique ou de l’ingénieur cède la place à une diversité de profils". La catégorie se féminise avec, en moyenne, 40% de femmes soit une progression de 5 points.
"la figure du cadre hiérarchique ou de l’ingénieur cède la place à une diversité de profils".
La pandémie de covid-19 a, néanmoins, participé à réaffirmer la frontière entre cadres et non-cadres, du moins dans les représentations. Le diplôme, le type de contrat ou le volume horaire demeurent les principaux traits distinctifs d’une catégorie moins homogène que par le passé. La possibilité des cadres de gérer, davantage que les non-cadres, leur temps de travail leur a permis de basculer plus aisément en télétravail.
Recadrer les pratiques
Mais, cette expérience contrainte de télétravail a nourri des attentes fortes de changement, jusqu’à donner envie à sept cadres sur dix de partir vivre à la campagne ! Par ailleurs, les trois-quarts d’entre eux estiment que les manières de travailler vont évoluer. Ils sont neuf sur dix à le souhaiter. 74% d’entre eux espèrent, à l’avenir, parvenir à trouver un équilibre plus satisfaisant entre vie professionnelle et vie personnelle. 71% voudraient travailler davantage à distance, au moins une fois par semaine pour 58% d’entre eux contre à peine 6% à plein temps.
7 cadres sur 10 désirent partir vivre à la campagne
Bénéficier d’une vraie déconnexion, être davantage consulté, passer moins de temps en réunion, avoir moins de tâches administratives, faire évoluer les pratiques de management : il existe, selon les cadres, de multiples leviers pour "mieux vivre leur travail". Mais, le chantier semble ambitieux. Si près de 60% des dirigeants croient possible une transformation des pratiques de management, seuls "24% des cadres supérieurs et 10% des cadres intermédiaires ont confiance dans la volonté de la direction". La balle se trouve donc dans le camp des dirigeants : c’est entre leurs mains que repose la future vie au travail des cadres.
Marianne Fougère, Anaïs Le Bomin