P.Dixneuf (Aviva France): « La priorité ? Que les femmes postulent aux postes de direction »
Décideurs. Vous avez publié un rapport sur l'égalité professionnelle chez Aviva au sein duquel figurent les résultats en matière d'égalité salariale. Pourquoi cette initiative ?
Patrick Dixneuf. Ce rapport est désormais obligatoire en Angleterre. Aviva UK a donc travaillé pour ce pays et je me suis dit que c'était une bonne idée de l'établir et le diffuser en France également… quels que soient les résultats. Y figurent d'ailleurs des chiffres plutôt positifs, et d'autres moins. Cette décision s'inscrit dans un souhait global de transparence que nous cultivons chez Aviva sur un ensemble d'autres sujets. Par exemple, puisque nous insistons auprès des collaborateurs sur le fait que nous souhaitons augmenter le nombre de nos clients, nous communiquons chaque mois le solde de nos clients.
Comment abordez-vous concrètement la question de la réduction des écarts salariaux ?
Bien sûr il faut allouer un budget destiné à compenser les écarts. Mais cela n'est pas suffisant. Nous avons également été attentifs aux augmentations. Chaque année, le comité exécutif se réunit et étudie l'ensemble des propositions d'augmentations avec attention. Cela permet une meilleure homogénéité. Au-delà, il s'agit de s'inscrire dans une logique de diversité. D’ailleurs – et c’est une fierté pour moi – notre comité exécutif lui-même est à parité, et les femmes y occupent les postes "régaliens". Notre directeur financier notamment est une femme.
« La parité doit rester un objectif et non une règle »
Votre rapport montre que les postes de direction sont toutefois encore majoritairement occupés par des hommes. Quelles actions mettre en place pour faire évoluer ces chiffres ?
De façon peut être surprenante la priorité n'est pas tant d'assurer la promotion de femmes mais plutôt de faire en sorte qu’elles se portent plus souvent candidates à des postes de direction. Elles sont souvent trop peu nombreuses à postuler. C'est un projet de longue haleine qui implique de faire évoluer l'environnement culturel. Dans notre structure italienne, nous avons participé à une association qui réunit des femmes à potentiel de différentes entreprises. Elles sont coachées par des chefs d'entreprise pour évoluer professionnellement. Au sein même d'Aviva, des clubs de leaders internationaux ont été initiés... Mais des éléments externes peuvent aussi aider. La transformation des métiers de l'assurance – à l’origine plutôt masculins – nous aide. Nous avons besoin d'intégrer des profils commerciaux, et des fonctions marketing et digitales, et c’est l’occasion d'aller vers plus de mixité. En revanche je suis convaincu que la parité doit rester un objectif et non une règle. Le choix d'une femme pour un poste doit se faire au mérite.
Quelle personne porte ces sujets au sein du groupe ? Vous-même, la DRH...?
Il ne s'agit par d'une thématique exclusivement RH. Dès lors que l’on décrète que ce sujet est essentiel, c'est le comité exécutif dans son ensemble qui doit le porter. Même si un membre du comex est sponsor du projet, il n'est pas la propriété d'une seule direction.
Envisagez-vous d'autres actions pour faire avancer la transparence que vous évoquiez... communiquer sur les salaires pratiqués au sein du groupe par exemple ?
La question est complexe. Nous avons déjà mené des actions en faveur de l'établissement de rémunérations équitables. Nous avons notamment veillé à une mise à niveau des salaires parmi les directeurs commerciaux. De là à avancer vers une transparence de chacun des salaires... Je ne suis pas certain que d'affronter ainsi de manière frontale ce tabou soit réellement efficace. J'aurais peur qu'il y ait plus de démagogie que d'efficacité dans la pratique.
Propos recueillis par Marie-Hélène Brissot
Chiffres clés :
166 collaborateurs dont 104 femmes ont bénéficié d'une mesure corrective d'écart salarial en 2017
Aviva a investi près de 2 millions d'euros pour réduire les écarts de salaires entre les femmes et les hommes depuis 2008