Par Marie-Anne Perrey, gérante. Calypso
Avec l’apparition de la Qualité de vie au travail (QVT) dans de nombreux accords d’entreprise, on peut se demander s'il ne s'agit pas là d'une nouvelle façon de rebaptiser le sujet des conditions de travail, ou si cela constitue un véritable enjeu stratégique pour l'entreprise de demain. Comment alors en déterminer l'importance ? Réponse : la QVT est-elle un vecteur de performance pour l'entreprise ?

Quand nous parlons aujourd’hui des conditions de travail, nous ne pouvons faire l’impasse sur la question de la prévention des risques psychosociaux, risques professionnels pouvant altérer la santé des salariés, et en particulier la santé mentale. Comment cela se traduit-il dans la réalité de la vie de l’entreprise ? Le plus souvent, ils conduisent à la signature d'un accord d’entreprise entre les partenaires sociaux et la direction de l’entreprise pour les plus grosses d’entre elles, par la réponse à l’obligation légale d’identification de ces risques psychosociaux dans le cadre du document unique, pour celles de taille plus modeste.

Une démarche d’amélioration de la QVT, ou comment sortir de la contrainte légale
Une étude menée auprès de directions d’entreprises a permis de révéler leur motivation vis-à-vis d'une telle démarche de prévention. Si le poids de l’obligation légale revient de façon significative, l'on comprend dès lors que la pérennité d’actions correctives qui pourraient émerger du terrain suite à la mise en place des démarches de prévention, est mise à mal dès le lancement de la démarche. En effet, comment faire vivre, de façon pérenne, une démarche regroupant différents acteurs de l’entreprise (direction, DRH, service de santé, ligne managériale, délégués du personnel, membres du CHSCT…) pouvant avoir des objectifs divergents, sur la seule base d’une obligation légale à respecter ? Quel peut être leur projet commun ? Si l’on se limite à la question de la gestion du «?risque?», on comprend vite qu’il est difficile de fédérer les énergies et de motiver les protagonistes pour s’investir dans un projet commun, qui n’aurait pour seul but de limiter le risque et ses conséquences sur la santé des salariés.
Pouvons-nous alors modifier notre regard sur la question de la gestion du capital humain dans l’entreprise en essayant d’aborder cette question sous l’angle de la performance ? L’humain, source de productivité, d’efficacité et d’efficience pour l’entreprise, plutôt que perçu uniquement que comme une ressource à optimiser en essayant «?de limiter la casse?». Passer d’une culture de la prévention et de la gestion du risque à un projet de développement de l’activité de travail et de ses contributeurs. En un mot, faire grandir l’entreprise et ses différentes parties prenantes. Sur cette base, il est plus aisé de positionner le capital humain, au cœur du système, comme un des leviers principaux de la compétitivité des entreprises.

Une démarche QVT = « repenser le travail?» à travers l’intelligence collective
La question de la qualité de vie au travail, telle qu’elle nous est présentée aujourd’hui permet alors d’aborder ces questions autour des conditions de travail de façon plus positive que la notion développée jusqu’alors via la lutte contre les risques psychosociaux. La QVT permet notamment de «?penser le travail » autour de ses différentes facettes (équilibre vie professionnelle/vie privée, qualité du dialogue social dans l’entreprise, démarche participative pour inciter les salariés à améliorer leur outil de travail, incitation à la créativité via l’innovation, intégration des nouveaux arrivants…) afin d’identifier les leviers de la performance de demain.
Mais alors, «?comment fait-on de la QVT ??». Il convient tout d’abord de délimiter le champ que l’on souhaite traiter dans l’entreprise à travers cette thématique. En effet, prétendre aborder l’ensemble des questions liées aux conditions de travail à travers un chapeau commun que serait la QVT peut paraître présomptueux. Il convient, dans un souci d'efficacité, de déterminer les thèmes qui seront travaillés puis évalués, comme leviers de performance possible pour l’entreprise. Autrement dit, faire converger le bien-être au travail avec la performance de l’entreprise. Faire fonctionner ensemble la performance sociale et la performance économique de l’entreprise. Mais de la performance de l’entreprise découle naturellement la question des choix stratégiques de l’entreprise. «?Penser
le travail autrement?», «?décider d’essayer de faire différemment?» ne peut donc devenir une réalité qu’à la condition impérieuse que l’entreprise valide ces orientations à son plus haut niveau, c’est-à-dire au travers de sa gouvernance.
Le principe mis en avant par ces politiques QVT s’articule autour de deux notions clefs : «?l’expérimentation?» sur le terrain et la valorisation de «?l’expression des salariés?» visant à l’évolution et l’amélioration de leur activité de travail. Chacun participe aujourd’hui à la construction de son travail pour demain.
Cette nouvelle façon de penser le travail et son évolution, si elle est très séduisante sur le papier, ne pourra prendre corps que si l’entreprise, qui investit dans cette nouvelle façon de réfléchir, peut récolter les fruits de cet effort du «?faire autrement?». Se pose également la question de l’évaluation des actions mises en place et de leur efficacité sur le terrain. Comment mesurer l’impact d’une démarche d’amélioration de la qualité de vie au travail ? La mise en place d'indicateurs d'efficacité présuppose qu’une photo de l’entreprise soit prise à un instant t, et que l’on puisse, étape après étape, évaluer les actions (baisse de l’absentéisme, diminution des arrêts maladie, augmentation de la performance, développement de l’innovation…).
Autant de sujets qui seront source de discussion et d’échanges entre les différents acteurs de l’entreprise. Cependant, cette dynamique sous-entend une posture particulière de la part de chacun : devenir un «?acteur responsable?», prêt à s’inscrire dans une démarche de co-construction de l’activité de travail de demain. Si cette idée peut paraître simpliste ou évidente de prime abord, elle reste encore éloignée du quotidien des entreprises. L'entreprise est-elle prête à favoriser le dialogue social ? Le comité de direction est-il prêt à accepter que sa stratégie soit orientée, remaniée suite à l’expression des salariés de terrain, que les partenaires sociaux co-construisent le travail de demain, main dans la main avec leur direction ? Du chemin reste à parcourir pour que la qualité de vie au travail devienne vecteur de réussite de l'entreprise.
Notre regard sur le monde du travail actuel, imprégné de notre culture franco-française, n’est certainement pas le principal atout pour favoriser un tel projet. Cependant, après avoir surmonté «?quelques freins?», peut-être pourrions-nous nous surprendre à réussir, qui sait ?


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