En matière de traitement des difficultés, faire montre de pédagogie est central. En France, malgré un arsenal juridique et judiciaire très complet issu de nombreuses réformes survenues au cours des dix dernières années, les dirigeants ne sont pas encore assez informés de tous les outils dont ils disposent pour redresser la barre. Ni des différentes assurances susceptibles de les aider à rebondir.

La survenance de difficultés dans la gestion de son entreprise est vécue comme un drame pour ses dirigeants. Le dépôt de bilan sonne bien souvent comme un échec professionnel aux lourdes conséquences personnelles résumé dans la formule dite des « trois D » : défaillance – dépression – divorce. Pour éviter d’en arriver à ces extrémités, un véritable travail de pédagogie doit être mené auprès des entrepreneurs et ce, sur deux fronts. Le premier concerne l’information sur l’existence, les conditions et les effets des différentes procédures, notamment celles amiables (mandat ad hoc, conciliation). Dans ce domaine, le tempo est un élément essentiel. Il s’agit de « savoir utiliser le bon outil au bon moment », confirme Jean-Charles Gancia, associé au sein du cabinet DS Avocats. Le second vise à rendre plus visibles des outils assurantiels encore trop méconnus.

L’assurance-chômage pour les dirigeants : l’arlésienne

Revenue sur le devant de la scène depuis l’élection présidentielle, la question de l’instauration de l’assurance-chômage pour les chefs d’entreprise est révélatrice de la méconnaissance d’un mécanisme qui existe pourtant déjà depuis près de quarante ans. Les dirigeants non salariés peuvent en effet souscrire un dispositif, la GSC, leur garantissant un revenu de remplacement en cas de perte de leur emploi. Artisan, commerçant et mandataires sociaux peuvent ainsi bénéficier d’une indemnisation pendant une durée de vingt-quatre mois maximum en cas de liquidation ou cession judiciaire, de fusion, de cession ou de dissolution anticipée décidée du fait de difficultés économiques de l’entreprise. La volonté exprimée par l’exécutif de généraliser ce mécanisme dont le bénéfice est aujourd’hui limité aux dirigeants s’étant expressément assurés, traduit une volonté d’accompagner le changement de mentalité qui s’amorce à peine. « Pour un salarié, le chômage n’est pas infâmant. C’est encore le cas pour un chef d’entreprise », déplore Christian Pascoët, pré-associé chez DS Avocats. « Avec la banalisation des start-up, les mentalités commencent à évoluer. Tenter, rater, recommencer devient plus naturel », tempère Jean-Charles Gancia.

Prévenir plutôt que faillir

Autre outil largement méconnu : l’assurance garantissant à son souscripteur une prise en charge des frais induits par l’ouverture d’une procédure de prévention. « Cette garantie santé entreprise permet d’aborder la phase de prévention des difficultés plus sereinement, en offrant au chef d’entreprise plus de temps pour se consacrer pleinement au redressement de son affaire », expliquent les deux experts. Enfin, si la faillite s’avérait inévitable, avoir veillé à se protéger contre les risques d’action en responsabilité civile pour faute de gestion commise dans le cadre normal de ses fonctions de dirigeant peut être salvateur en favorisant un rebond personnel plus prompt. Comment expliquer que ces mécanismes, conçus pour accompagner les phases difficiles, demeurent encore largement ignorés ? La faute est collective à en croire Christian Pascoët. « C’est aux conseils habituels d’informer leurs clients. Les avocats, commissaires aux comptes, assureurs ou comptables devraient sensibiliser les dirigeants sur l’existence de ces outils et l’opportunité d’y recourir », reconnaît-il. D’ailleurs, une fois l’obstacle de la méconnaissance effacé, se dresse celui du coût de ces assurances. Or, chaque poste de dépense a son importance, surtout dans les petites entreprises… Le travail de pédagogie pour faire comprendre qu’il s’agit là d’un investissement sur l’avenir ne fait que commencer.

Sybille Vié

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