Hervé Gastinel, Président de Terreal nous livre sa vision de la restructuration du groupe de construction
Décideurs. Quelles ont été les principales mesures des différents plans de restructuration qui ont été réalisés ?

Hervé Gastinel.
Le leveraged buy-out que nous avions mis en œuvre en 2005 aux côtés de LBO France devait nous permettre de financer notre croissance externe, et notamment l’acquisition de Lahera, mais aussi de moderniser et d’augmenter nos capacités industrielles à hauteur de 150 millions d’euros. Malheureusement, nous avons été rattrapés par la crise et avons accusé une baisse de 30 % de notre chiffre d’affaires. Nous nous sommes donc retrouvés en situation de rupture de covenants bancaires en 2009.
Si notre première restructuration et la conversion d’une partie des instruments financiers principalement en quasi-fonds propres nous ont permis de faire passer notre dette de 900 millions à 500 millions d’euros, le business plan qui soutenait cette réorganisation se basait sur une reprise progressive de notre activité à partir de 2011. Or cette reprise s’est brutalement interrompue en 2012 et le cycle économique s’est de nouveau inversé. En réaction, nous avons donc décidé de franchir une étape supplémentaire en réduisant notre dette de 500 millions à 300 millions d’euros par le même jeu de conversion d’instruments financiers, mais cette fois en fonds propres directs, entraînant un changement de contrôle. Trois possibilités se présentaient à l’époque à LBO France, l’actionnaire majoritaire : céder l’entreprise à un tiers, renforcer les fonds propres ou céder le contrôle de Terreal aux créanciers. C’est cette dernière option qui a finalement été choisie. Ce sont trois créanciers, en l’occurrence ING et les fonds Park Square Capital et Goldman Sachs, qui ont pris 54 % du capital. En contrepartie la dette a été réajustée à un niveau soutenable dans le cadre d’un business plan anticipant une reprise du marché de la construction progressive et prudente, à partir de 2015.


Décideurs. Comment se sont déroulées les négociations qui ont abouti à l’intégration de vos créanciers dans le capital de Terreal ?

H. G.
Les négociations se sont déroulées en bonne intelligence. Chacun a su prendre ses responsabilités et agir dans l’intérêt de l’entreprise. Preuve en est, Terreal n’a pas eu à céder un seul de ses actifs ni à recourir au moindre plan social comme il est trop souvent d’usage en pareil cas. Le transfert de contrôle de la société entre les actionnaires et les créanciers s’est réalisé au niveau de la holding et n’a pas impacté les sociétés opérationnelles. Je me suis d’ailleurs assuré que la stratégie de développement de Terreal ne serait pas affectée par ce changement d’actionnariat. La restructuration financière a eu pour effet de rééquilibrer le bilan et d’allonger les maturités tout en réduisant le coût de la dette. Aucune injection de cash n’a été nécessaire.


Décideurs. Comment dirigez-vous la société en présence d’actionnaires qui étaient auparavant vos créanciers ?

H. G.
Il était essentiel que la gouvernance de la société ne soit pas dénaturée par des considérations exclusivement financières. Nous pouvions craindre de prime abord que nos nouveaux actionnaires ne se concentrent que sur le remboursement de la dette en négligeant la création de valeur à moyen-long terme. C’est pourquoi, à la demande de l’entreprise, et je tiens à le souligner en plein accord avec les créanciers, nous avons décidé d’opter pour un mode de gouvernance original. Nous avons pour cela procédé au recrutement de trois administrateurs indépendants qui sont des professionnels chevronnés de l’industrie et du secteur de la construction. Ils ont aujourd’hui la responsabilité, à mes côtés, d’animer la vie du groupe. En vertu de cette nouvelle gouvernance, les actionnaires ont délégué au conseil d’administration une grande partie de leurs responsabilités et de leurs pouvoirs.

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