Le fournisseur de services et d’équipements aux entreprises et collectivités John Cockerill ouvrira en 2022 une usine d’électrolyseurs en Alsace. Un atout pour la France qui développe son énergie verte. Anne-Françoise Laime, déléguée générale France, nous parle de ce projet.

Décideurs. John Cockerill est depuis quelques années déjà présent sur le marché de l’hydrogène en Asie. Comment développez-vous celui-ci en Europe ?

Anne-Françoise Laime. En Asie, ce marché s’est beaucoup développé depuis trois-quatre ans. Grâce à notre joint-venture en Chine, Cockerill Jingli Hydrogen, nous disposons d’une véritable expérience et avons pu mettre au point des électrolyseurs capables de générer 5, et maintenant 6 mégawatts. Le sujet de l’hydrogène, et plus généralement de la transition énergétique, est devenu stratégique pour l’Union européenne qui souhaite regagner en souveraineté. L’UE ne veut plus reproduire ses erreurs en ne soutenant pas les équipements permettant de produire de l’énergie, comme cela a pu être le cas par le passé avec le solaire. C’est pourquoi nous investissons en Europe.

Ce qui passe par un nouveau projet d’usine en Alsace ?

Tout à fait. Il s’agit d’une usine - une gigafactory - qui sera à 100 % européenne et à 80 % française. Opérationnelle dès 2022, elle montera peu à peu en puissance avant de produire chaque année, en vitesse de croisière, environ 200 électrolyseurs de 5 à 6 mégawatts. Nous développons des électrolyseurs de grande capacité et espérons monter en gamme avec des appareils de 7,5 voire 10 mégawatts pour répondre aux besoins des grands industriels ou des services publics.

"L’Union européenne ne veut plus reproduire les erreurs passées en matière d’énergie"

Plus globalement, vous souhaitez développer l’écosystème hydrogène. Comment vous y prenez-vous ?

Nous disposons d’un centre de R&D en collaboration avec l’IRT (Institut de recherche technologique) de Metz où nous mettrons à disposition de tout l’écosystème de l’hydrogène un démonstrateur avec lequel les acteurs pourront tester leurs composants critiques. Ce qui nous permettra de rester au courant de ce qui se fait de mieux sur le marché. En 2020, nous avons également créé un fonds industriel, Industrya, pour soutenir les start-up françaises, allemandes et luxembourgeoises tournées vers la transition énergétique, et développons un fonds de private equity, Cockerill Capital, pour financer des projets notamment dans les domaines de l’hydrogène et de la valorisation des déchets. Enfin, nous faisons partie des organismes de réflexion en France sur le déploiement de l’hydrogène.

John Cockerill est présent sur différents secteurs d’activité, comme l’environnement ou la défense. Quelle part l’hydrogène pourrait-il prendre dans votre business ?

L’hydrogène s’inscrit dans un axe de diversification de nos activités qui ont, elles aussi, vocation à vivre leur vie. L’hydrogène ne va pas les remplacer mais deviendra un élément fort et de plus en plus important de notre stratégie.

L’Europe, et la France notamment, souhaitent investir dans l’hydrogène à travers les plans de relance. Vous avez postulé pour des financements. Pourquoi ?

Nous avons besoin du soutien financier de l’État car l’hydrogène vert coûte plus cher que l’hydrogène gris (issu des énergies fossiles). Les premières installations sont toujours plus onéreuses que celles qui suivent. Pour le moment l’hydrogène dépend à 70 % du prix de l’électricité. On cherche des moyens différents pour le rendre plus compétitif. Notre projet va créer de l’emploi. Nous serons à 50 kilomètres de Fessenheim, ce qui permettra de reclasser des salariés. En outre, nous ouvrons les financements aux investisseurs institutionnels qui souhaitent prendre leur part dans la transition énergétique.

Propos recueillis par Olivia Vignaud

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