Quelques mois après la création de Lexavoué, un premier bilan peut être tiré : celui de la réussite d’un business plan innovant dans un contexte de forte concurrence.

En 2008, la rumeur, 2009 l’annonce, 2011 la loi, 2012 la disparition effective. L’histoire de la suppression de la profession d’avoué a fait couler beaucoup d’encre. Jusqu’au bout, nombreux sont ceux qui ont espéré le retrait de la réforme, conservant leurs positions. Les avocats de Lexavoué ne sont pas de ceux-là. Dès 2009, Philippe Leconte réunit autour de lui de jeunes confrères prêts à capitaliser sur leurs compétences et leur réseau. Deux ans de préparation pour, le jour J, ouvrir les portes de leur nouvelle structure.

Année n + 1
Le 1er janvier 2012 est donc une date marquante pour Lexavoué. À double titre : elle est celle de la suppression de la profession d’avoué devant les cours d’appel, mais aussi le jour de la naissance officielle de la nouvelle structure. Depuis, l’entreprise connaît un vrai succès.
Lexavoué réunit d’abord seize implantations dans plusieurs capitales régionales pour aujourd’hui atteindre vingt-six associés dans vingt cours d’appel. Après l’ouverture en 2012 à Rennes, Nîmes, Toulouse et Rouen, la croissance continue puisque le groupe examine actuellement quatre nouvelles candidatures. Lexavoué attire les anciens avoués talentueux qui ont plongé dans la profession d’avocat. « Pari réussi, se félicite Philippe Leconte, puisqu’en perdant notre monopole, nous n’étions pas certains d’avoir choisi le bon positionnement. » Une reconversion réussie qui séduit les anciens avoués les plus désireux de proposer leur savoir-faire dans une structure solide et reconnue.

Une éthique supplémentaire
À l’origine de la création du groupe se trouve l’esprit entrepreneurial des associés. Une charte de qualité et d’éthique constitue le fondement de leur coopération autant qu’une garantie pour les clients du bon fonctionnement de la relation professionnelle. Elle est la marque de l’adaptation des anciens avoués à un nouveau mode d’exercice professionnel puisqu’elle impose, au-delà de la déontologie des avocats, des règles de fonctionnement.
Au cœur de celles-ci : le refus de toute tentative de captation de dossiers, garantie fondamentale pour les cabinets d’avocats, qui constituent eux-mêmes la principale clientèle de Lexavoué. Ces derniers ont certes commencé, à la suite de la réforme de 2011, à s’équiper de spécialistes de la procédure d’appel en interne et certains avocats, pourvus d’une clé permettant la communication électronique avec les tribunaux, se sont rodés à la procédure civile devant les cours d’appel. Mais nombreux sont les contentieux qui demandent plus d’expertises qu’une simple application des règles du Code de procédure civile. Le recours à un ex-avoué semble alors nécessaire pour garantir au client le traitement dans les meilleures conditions du contentieux complexe en appel. Face à la crainte qui pourrait surgir de voir le client satisfait se tourner vers ce nouveau partenaire pour lui confier d’autres dossiers, Lexavoué oppose le refus de tout dossier en provenance de cette clientèle identifiée.
La protection en cas de faute professionnelle finit de convaincre, puisqu’avec un montant de base garanti fixé à plus de quinze millions d’euros pour tout associé, Lexavoué permet à ses clients d’échapper de fait à tout engagement de sa responsabilité civile professionnelle.

Un business plan performant
L’atout principal de Lexavoué est son business plan réfléchi et ciselé dans ses moindres détails. Au-delà des éléments objectifs (charte d’éthique, grille de facturation, présence régionale, structuration en holding, etc.), le groupe s’est assuré un positionnement performant. Les avocats de Lexavoué restent avant tout des spécialistes de la procédure d’appel. C’est en capitalisant sur leur expertise d’avoué qu’ils sont parvenus à transformer le recours obligatoire à un officier public pour traiter des dossiers d’appel en une sollicitation naturelle. « Aujourd’hui, ce sont majoritairement les grosses structures d’avocats qui se tournent vers nous. Les cabinets de grande taille ont déjà l’habitude d’externaliser certaines prestations et certain contentieux. Et il est indéniable que recourir à notre marque donne confiance aux clients de nos clients », précise Philippe Leconte. Ainsi, ce sont pas moins de 12 000 dossiers d’appel que le groupe a ouverts au cours de sa première année.
Le second atout fondamental de Lexavoué est la connaissance des usages des magistrats. Les avoués, qui ont évolué durant plusieurs années dans l’environnement juridictionnel de leur cour d’appel, connaissent l’interprétation des règles de procédure civile qui est faite par chacune d’elles. Face à l’éclatement de l’unité du Code de procédure civile en raison de la multiplication des protocoles de procédure dans chacun des tribunaux et cours, Lexavoué est armé. « L’évolution de la procédure civile telle que voulue par la réforme Magendie a créé un régionalisme avancé, une forme de "balkanisation", comme l’appelle le professeur Croz, créant ainsi des zones de conflits et d’incompréhension pour les acteurs de la justice et donc pour le justiciable », explique Philippe Leconte. « La procédure Magendie est un champ de mines que nous maîtrisons », poursuit Matthieu Boccon-Gibod, codirecteur général. Les avocats de Lexavoué ont été et demeurent de vrais partenaires des conseillers des cours d’appel : « Avec la mise en place des décrets [Magendie], est créée une phase de "chicanerie procédurale" qui occupe largement l’activité des conseillers de la mise en état », note enfin Romain Laffly dans un article publié récemment1.
Dans ce contexte, Lexavoué ne craint pas la future réforme supprimant la postulation en appel. Annoncée de longue date, elle n’ôterait pas l’intérêt d’avoir un correspondant dans chacune des cours d’appel puisque la postulation demeurerait de fait.

La double robe
Lexavoué bénéficie également d’une exceptionnelle faculté d’adaptation. Plongé sur le marché des avocats par une reconversion imposée, le groupe en tire aujourd’hui l’avantage d’étendre son champ d’intervention. Les nouveaux défis qui se présentent à lui prennent la forme de la constitution d’une clientèle, de la plaidoirie, du traitement des dossiers de première instance, de l’implication sur le fond de l’argumentation et dans le développement de leurs interventions. Autrement dit, conquérir un pan juridique supplémentaire pour acquérir de nouvelles parts de marché.
Les avocats de Lexavoué se préparent actuellement à une autre transformation du monde juridique : le recours aux modes alternatifs de règlement des conflits. Grâce à l’expertise de Sophie Crépin, associée à Pau, les associés de Lexavoué ont entamé des formations à la médiation et au droit collaboratif. Qui mieux qu’un professionnel du contentieux pour parvenir à une solution négociée ?

Au-delà de l’avocature
Pour l’avenir, Lexavoué ne se limite pas à l’exercice des professions d’avoué, d’avocat et de médiateur puisque ses associés sont dotés d’un esprit particulièrement entreprenant sur les opérations d’interprofessionnalité. Les statuts de la structure, une SPFPL (société de participations financières de professions libérales) constituée en holding, présentent l’avantage de la souplesse pour son développement. Afin de présenter une offre complète de services, de l’assignation à l’exécution de l’acte de justice, Lexavoué est partenaire de l’étude d’huissiers de justice Molho-Massart-Misrahi-Brun-Veque à Lyon, qui gère les actes dans la France entière. Après avoir collaboré plusieurs mois pour le dépôt des actes et le traitement du dossier par voie dématérialisée, les deux structures sont maintenant partenaires, pour un jour devenir, si l’essai est transformé, les deux pans d’une même société. Cinq salariés sur les vingt que compte l’étude sont dédiés à l’activité de Lexavoué et depuis septembre 2012, une plateforme de dépôt d’actes (avec accusé de réception dans l’heure et redistribution à un huissier compétent) a été mise en place. Pour les dossiers transnationaux, l’étude est en mesure de délivrer un acte à l’étranger. Ce maillage de correspondants partout en France garantit rapidité, qualité, sécurité et surveillance de la bonne délivrance des actes de justice. Une sécurité qui sera totalement intégrée au groupe si le projet de réunir avocats et huissiers de justice se réalise entre les murs de Lexavoué. Les projets de la structure naissante ne cessent de se multiplier. La suppression de la profession d’avoué près les cours d’appel, vécue comme une injustice il y a encore quelques mois, est une fabuleuse opportunité de développement du business et de multiplication des interventions de ces professionnels guidés par un fort esprit entrepreneurial. Le positionnement de Lexavoué, qui le déleste de toute concurrence sur le marché, est indéniablement le bon chemin vers la réussite.

1JCP G, 9 févr. 2013, n°?9, page 434 à 441

Pascale D'Amore

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