Avec des chaînes d’approvisionnement tendues et des prix de l’énergie instables, la pression ne cesse d’augmenter sur les sites industriels pour se moderniser, améliorer les processus et la rentabilité. La diversité importante des pratiques et le besoin de croissance nécessitent de lancer des projets de transformation. Quelles sont les clés indispensables pour mener à bien ces projets digitaux et accompagner la croissance ?

Quelle entreprise industrielle n’a pas été un jour confrontée à l’évolution rapide de son business model ? À des pratiques divergentes entre ses sites ? À des volumes importants de données non exploitées ? À des systèmes d’information silotés ou obsolètes ? La prise de conscience démarrée il y a plus de deux ans avec l’accroissement des contraintes sur les chaînes d’approvisionnement, s’est brusquement accélérée avec la crise de l’énergie liée au contexte géopolitique. L’urgence des transformations digitales nécessaires pour accompagner la croissance des sites industriels devient maintenant un véritable enjeu de survie.

Identifier les axes d’amélioration dans un temps court

L’identification d’axes d’amélioration constitue le point de départ de toute démarche de transformation. Cette étape doit être rapide et n’a pas vocation à être exhaustive. Elle commence par une observation précise sur le terrain qui se fera au travers d’une immersion auprès des équipes des différents sites. C’est ainsi que l’observation des tâches et de leur enchaînement, permet de comprendre la réalité des processus et d’identifier l’ensemble des acteurs et leurs interactions. L’observation est d’autant plus efficace et rapide qu’elle est structurée grâce à un outil d’audit s’appuyant sur l’ensemble des bonnes pratiques métiers issues des principes de l’excellence opérationnelle : segmentation ABC dans la gestion des stocks, ordonnancement de l’ensemble des étapes du flux, maîtrise du cycle S&OP, etc.

Chaque entité maîtrise parfaitement ses processus, mais n’est souvent pas en mesure de visualiser l’ensemble de la chaîne

Cette démarche "data driven" (basée sur l’analyse des données existantes) couplée avec le process mining [exploration et amélioration des processus à partir des données extraites des systèmes de journalisation d’évènements], permet de construire les diagnostics et les recommandations. À partir de ce travail et en le rapprochant des benchmarks, il est alors possible d’identifier, de partager et de prioriser les actions d’amélioration qui vont irriguer la transformation à venir.

Fluidifier et simplifier des processus industriels complexes

Une des problématiques les plus courantes chez les acteurs industriels est le silotage des organisations et le manque de partage entre les différents secteurs d’un site industriel (production, qualité, supply, achats, contrôle de gestion, etc.). Plus spécifiquement, la cartographie d’un flux supply passe par la gestion des prévisions et de la demande, l’analyse capacitaire, la confirmation de la prévision, la planification de la production et l’ordonnancement.

Chaque entité maîtrise ainsi souvent parfaitement ses processus, mais n’est pas en mesure de visualiser l’ensemble de la chaîne. Il est alors nécessaire de conduire des ateliers de coconstruction pour cartographier, mettre en évidence et faire comprendre l’ensemble des processus transverses. Cette étape est critique pour enclencher un partage et mettre en place un langage commun. Le but principal est tout autant d’aligner l’ensemble des acteurs que de mettre en évidence les fluidifications ou les simplifications à apporter à certains processus complexes permettant ainsi leur optimisation.

Accompagner la modernisation au travers d’une démarche agile et itérative

Avec des problématiques variées telles que l’implémentation d’ERP (systèmes informatiques intégrés de gestion) ou encore la mise en conformité aux normes ISO, RGPD ou dossiers de lots, la transformation digitale impose aux acteurs des sites industriels d’être extrêmement agiles dans leurs projets. Cela permet de répondre aux enjeux réglementaires mais aussi aux enjeux opérationnels. L’ensemble du cycle de vie du projet, de la phase de cadrage jusqu’à la phase d’implémentation doit être ainsi conduit au travers d’une approche itérative. Grâce à cette approche, il est possible d’ajuster les décisions et les choix au fil de l’eau lors des différentes étapes du projet, de permettre l’émergence de solutions et d’éviter l’effet tunnel.

Anticiper les changements avec la fonction RH

Réussir la transformation n’est possible que si le projet embarque dès le démarrage l’ensemble des parties prenantes et des collaborateurs. L’humain doit être placé au coeur du projet pour limiter l’effet de rejet lié au changement. Il faut anticiper en préparant bien en amont l’évolution des organisations avec l’ensemble des outils nécessaires (définition des nouvelles fiches de postes, formation du personnel, réorganisation, etc.) et disposer d’un plan de communication clair, détaillé et régulier qui permettra de donner de la visibilité, en embarquant l’ensemble des collaborateurs.

La fonction RH va jouer un rôle essentiel dans les étapes du projet

Au côté de la communication, la fonction RH va donc jouer un rôle essentiel dans les étapes du projet pour préparer les nombreux changements organisationnels. Elle assure dès le démarrage l’identification des compétences critiques (analyse de la traçabilité produit, ordonnancement, GMAO, etc.), les recrutements nécessaires (technicien qualité, ordonnanceur, technicien de maintenance, etc.) et se charge de sécuriser la montée en compétences de chacune des populations impactées.

Conduire la transformation en s’appuyant sur 4 piliers

La transformation d’un site industriel dans une logique de croissance interne ou externe repose donc sur 4 piliers fondamentaux indissociables : l’humain, l’excellence opérationnelle, la digitalisation et le management & l’organisation. Ces 4 piliers permettent de maîtriser la transformation sur l’ensemble des aspects. L’humain est le facteur principal qui doit être au coeur de la transformation et qui, une fois appliqué, permet d’ancrer tout projet sur le terrain et d’assurer la bonne compréhension de l’ensemble des parties prenantes. L’excellence opérationnelle permet d’optimiser les processus en les rendant plus fluides et plus simples. Cela se traduit par l’ancrage de l’amélioration continue à travers la systématisation de la collecte et du partage des bonnes pratiques qui permet de faire vivre la transformation dans le temps et sécurise son adoption. La digitalisation apporte de nouveaux outils aux sites industriels en facilitant le traitement des données et la mise en oeuvre des processus. Enfin, le management et l’organisation donnent la cohérence et agissent en véritable liant entre chacun des piliers.

SUR LES AUTEURS

Alexis Berhault, Consultant Senior Industrie chez SpinPart : Alexis travaille dans le secteur de l’industrie (énergie, auto, pharma) depuis plus de six ans, et intervient principalement sur des projets de transformation digitale. Il est diplômé de l’École centrale d’électronique de Paris.

Laurent Mauduit, Associé Industrie & Énergie :  Laurent dispose de plus de 25 ans d’expérience au sein de grands groupes français, japonais et américains sur des programmes de transformation, de performance des processus et de Revenue Management. Il est diplômé de l’École polytechnique et de l’Ensta Paris.


Personnes citées

Laurent Mauduit

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