D. Checoury (Stanhope Capital) : " Ne pas vendre ses investissements boursiers dans la panique"
Décideurs. Sur quelles expertises reposent votre activité ?
David Checoury. Nous sommes un véritable « one stop shop « pour les familles. Dans le cadre de notre expertise en gestion de fortune, nous conseillons 180 familles, principalement anglaises et françaises. Nous accompagnons également une cinquantaine d’institutions financières dont des fondations caritatives.
Nous avons par ailleurs une activité dédiée au Private Equity pour accompagner nos clients dans leurs investissements dans des fonds directs ou par l’intermédiaire de fonds de fonds : Investir dans les meilleurs fonds en Private Equity dans le monde nécessite de placer des tickets souvent supérieurs à 10 millions de dollars. En réponse, nous avons construit une offre en fonds de fonds permettant à nos clients d’y accéder plus facilement, à partir de 250 000 euros. Une stratégie que nous appliquons également à l’immobilier. Parmi nos investissements, nous pouvons notamment citer celui de notre fonds Stanhope Entrepreneurs Fund, devenu actionnaire stratégique de S4 Capital, le groupe de Sir Martin Sorrell spécialisé dans le marketing digital. Une activité qui a prouvé sa résilience et qui, malgré les difficultés actuelles des marchés financiers, présente encore un vrai potentiel de croissance.
Enfin, notre division banque d’affaires est capable de conseiller nos clients sur des opérations de haut et de bas de bilan.
Quelle typologie de clients accompagnez-vous ?
D.C. Nous avons deux catégories de clients. Les grandes familles dont la fortune est issue d’héritage. Celles-ci se placent dans une optique de transmission et de protection de leur capital.
Nous conseillons aussi des entrepreneurs ayant cédé tout ou partie de leur société. Nous remarquons que cette deuxième catégorie a une moindre tolérance aux risques et à la volatilité des marchés. Ils souhaitent également être davantage associés aux décisions et investir en direct dans les entreprises.
"La situation semble se stabiliser en Chine. Nous invitons les investisseurs à profiter de la baisse des marchés pour investir dans cette région."
Qu’en est-il de votre mode de rémunération ?
D.C. Le modèle économique des banques privées, reposant principalement sur les commissions, est à notre sens, source de conflits d’intérêts. Pour éviter cet écueil, nous avons fait le choix très tôt il y a quinze ans, dès la fondation de Stanhope, d’une politique de facturation calculée uniquement sur le montant des encours sous notre gestion. Stanhope n’est ainsi rémunéré que par ses clients, et non pas, par exemple, par des rétrocessions de commissions de fonds tiers.
Anne Béjui-Thivolet. Notre modèle se veut simple, transparent et sans conflits d’intérêts, ce qui est disruptif dans notre industrie. Forts de nos principes, nous travaillons en architecture ouverte avec les meilleures sociétés de gestion mondiales. Disposant d’une équipe de 20 spécialistes dédiés à la recherche, nous mettons en œuvre une gestion de conviction, centralisée, avec l’application de modèles stratégiques et tactiques. La gestion du risque est au cœur de nos processus d’investissement. Nous avons aussi développé une offre ISR de premier plan, mettant l’emphase sur l’environnement, la dimension sociétale et la gouvernance, en réponse à l’intérêt croissant de nos clients, et notamment des nouvelles générations, sur ces thématiques.
"La correction sur les marchés financiers n’est peut-être pas encore terminée"
Revenons sur l’extrême volatilité qui touche les marchés financiers. Ceux-ci sont-ils arrivés à un tournant ?
D.C. La baisse de plus de 20 % des principaux indices boursiers a acté leur entrée en bear market. Nous sommes dans une zone d’une extraordinaire violence. Au cours des cent dernières années, seules une vingtaine de séances avaient fait l’objet d’une baisse supérieure à celle du 3 mars dernier. La baisse de plus de 12 % du CAC 40 lors de la séance du 12 mars constitue quant à elle un record. La situation semble cependant se stabiliser en Chine. Une partie de l’appareil productif du pays a été relancée. Nous invitons les investisseurs à profiter de la baisse des marchés pour investir dans cette région. En Europe, l’Italie et la France sont encore au cœur du cyclone et la pandémie semble prendre de l’ampleur. Difficile toutefois de dire quand le pic sera atteint et quelle sera l’ampleur des dégâts qui peut être très importante. Toutefois il faut savoir garder raison.
Quelles décisions prendre alors que l’on manque de visibilité sur les conséquences humaines et économiques liées à la propagation du Coronavirus ?
D.C. L’une des règles d’or de l’investissement boursier est de ne pas vendre dans la panique. Sur le long terme les actions sont l’une des classes d’actifs les plus performantes. L’Economie américaine a prouvé sa capacité de résilience, à créer des entreprises championnes dans leur domaine. C’est pour cette raison que nous continuons un porter un grand intérêt aux marchés américains, dans le cadre d’un horizon d’investissement à long terme. Il faut garder des liquidités de côté et progressivement augmenter son exposition aux actions, en fonction de l’allocation stratégique prédéfinie.
A. B-T. Notre rôle est d’accompagner et de conseiller les familles dans la durée, de les aider dans la formulation d’une stratégie d’investissement globale sur le long terme. Au cours des deux derniers mois, les marchés ont effacé une grande partie voire la totalité des gains de 2019. La performance de l’Euro Stoxx sur les 5 dernières années est de -15.5% (en date de clôture du 13 mars). Le point d’entrée est donc relativement attractif pour les investisseurs à long terme. Nous restons toutefois prudents dans le déploiement car la correction n’est peut-être pas encore terminée
Sur le plan financier, 2020 devrait être une année blanche, avec une baisse attendue des bénéfices des entreprises. Les banques centrales et les États ont déjà annoncé des plans de sauvetage massifs ce qui devrait aider à amortir le choc économique du COVID-19. Il est à ce titre possible que les gouvernements utilisent l’arme de l’helicopter-money directement auprès des entreprises ou des consommateurs, sous la forme de baisse de charges sociales, de taxes voire d’impôts. Toutes ces mesures laissent envisager une reprise de la croissance des résultats des entreprises à partir de l’année prochaine. En revanche il faudra être très sélectif dans le choix des secteurs et des sociétés à détenir dans les portefeuilles.