Directrice responsabilité sociale du groupe STEF, leader européen des services consacrés au transport et à la logistique de produits alimentaires sous température contrôlée, Céline Marciniak nourrit de fortes ambitions en matière de santé et de sécurité des salariés. Elle revient sur les engagements du groupe pour la prévention des risques professionnels.

Décideurs RH. Quels sont les ambitions et les objectifs de STEF en matière de sécurité et de santé au travail ?

Céline Marciniak. Notre politique SSCT (Santé, sécurité et conditions de travail) fait partie intégrante du plan stratégique global du groupe. Portée au plus haut niveau, elle répond à des enjeux de bien-être et de fidélisation des salariés ainsi que d’attractivité. Aussi, nous œuvrons à l’amélioration constante des conditions de travail en opérant des changements organisationnels, techniques et humains.

Offrir aux équipes un cadre de travail amélioré et sécurisé exige d’évaluer et de prévenir les risques propres à notre secteur d’activité : les troubles musculosquelettiques (TMS), les collisions entre engins et piétons, les chutes dans les entrepôts, les départs inopinés de camions, etc.

Nous avons signé en octobre 2022 un engagement national auprès des Carsat (Caisses d’assurance retraite et de la santé au travail) et de la Cramif (Caisse régionale d’assurance maladie d’Île-de-France) pour aller encore plus loin dans nos démarches. Cet accord formalise trois axes majeurs : développer la culture SSCT auprès de tous nos managers, réduire les risques d’apparition des TMS, dont ceux liés aux manutentions manuelles, limiter la survenue d’accidents graves et lutter contre la désinsertion professionnelle.

Quelle place le pilotage managérial occupe-t-il dans la politique de sécurité du groupe ?

Le pilotage par le management de la politique SSCT est essentiel, à travers l’instauration d’une instance spéciale et d’une feuille de route annuelle. Nous déployons une formation à l’ensemble de la ligne managériale. Cette formation, nommée « Manager par la sécurité », incarne notre ambition. Nous visons, d’ici à 2025, le déploiement d’un pilotage managérial de la SSCT dans 90 % des sites du groupe et dans 100 % des sites d’ici à 2026.

Le pilotage de la politique de prévention par le management est une clé de réussite, mais ce n’est pas la seule. En effet, les démarches de prévention qui se concentrent uniquement sur les aspects techniques des solutions sont généralement inefficaces. Quels que soient la thématique, les métiers et les environnements de travail, il est indispensable d’écouter les collaborateurs concernés, de les rendre acteurs du changement, afin d’assurer l’efficacité des mesures de prévention. Et ce, au service du bien-être et de la performance durable des équipes.

Il est indispensable d’écouter les collaborateurs concernés, de les rendre acteurs du changement, afin d’assurer l’efficacité des mesures de prévention

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Vos résultats sont-ils encourageants ?

Le taux de fréquence des accidents du travail a diminué de 33 % entre 2017 et 2023, et nous nous en réjouissons. Mais ce n’est qu’un début et nous devons persévérer.

Nos objectifs sont plus larges : mener, d’ici à 2026, au minimum une démarche d’amélioration des conditions de travail qui intègre les salariés par périmètre, assortie d’une révision annuelle des plans d’actions de prévention de nos facteurs de risques et d’une analyse systématique des causes d’accidents ou presque-accidents du travail qui surviennent. C’est indispensable à notre progression.

Quels dispositifs de prévention avez-vous privilégiés ?

Afin de lutter contre les TMS, nous veillons à adapter les postes de travail et à limiter les tâches les plus contraignantes. Par exemple, nous déployons actuellement des tables de mise à niveau pour placer les colis et charges à un niveau adapté à chaque salarié. Nous poursuivons aussi le déploiement de systèmes de filmage automatique des palettes.

Nous avons créé, depuis 2016, des panoplies de vêtements de travail adaptés. Ces panoplies ont été conçues en intégrant l’avis des utilisateurs et des utilisatrices. Par exemple, les coupes influent sur la protection contre le froid et nous avons ainsi différencié les modèles hommes et femmes pour tenir compte des morphologies. C’est basique, mais fondamental pour répondre aux besoins réels des collaborateurs.

Par ailleurs, nous sommes attentifs à la santé mentale des équipes et proposons plusieurs dispositifs de soutien et d’accompagnement, dont une ligne d’écoute 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 avec des psychologues du travail. Nous avons également ouvert un campus parentalité, dont bénéficient actuellement 3 500 parents du groupe, avec une plateforme de soutien scolaire du CP à la terminale.

Enfin, nous essayons de promouvoir différentes pratiques de prévention individuelle (échauffements, étirements, ostéopathie…) et menons des campagnes de communication diversifiées afin de rendre ces soins plus facilement accessibles à nos collaborateurs.

Il est essentiel d’analyser les causes d’accidents du travail ou presque-accidents qui surviennent. C’est indispensable à notre progression

Avez-vous fait le choix des exosquelettes pour lutter contre les TMS ? 

Dans l’imaginaire collectif, l’exosquelette peut résoudre tous les problèmes. Or, c’est un dispositif qui ne doit être envisagé que dans des situations très spécifiques.

Nous avons testé une quinzaine d’exosquelettes depuis 2017 auprès de plus de 400 personnes, avec notamment des mesures d’activités musculaires. Nous nous sommes rendu compte qu’ils n’étaient pas efficaces dans toutes les situations, et que la priorité restait de nous focaliser sur les conditions et l’organisation du travail. C’est pourquoi nous ne déployons actuellement qu’un seul exosquelette, à grande échelle et sur une activité de logistique spécifique.

Observez-vous une exposition différenciée aux risques entre les hommes et les femmes chez Stef ?

Depuis deux ans, nous suivons l’accidentologie de façon genrée, afin de voir s’il existe une différence entre les femmes et les hommes. Pour l’instant, aucune disparité n’est apparue.

Néanmoins, une attention particulière est portée à l’égalité professionnelle et à la mixité, dans un secteur encore majoritairement masculin. Nous avons aujourd’hui 21,8 % de femmes parmi nos effectifs. Nous souhaitons atteindre 25 % d’ici à 2030. Pour cela, nous disposons de plusieurs leviers, dont celui des conditions de travail : c’est là qu’interviennent par exemple les tables élévatrices et les filmeuses automatiques. Nous cherchons aussi à changer l’image des métiers du transport et de la logistique et à démontrer, à travers des retours d’expérience, que nos métiers et nos parcours de carrière sont accessibles aux femmes comme aux hommes. C’est pour cela qu’en complément de l’action des managers et des responsables RH nous avons créé, dans le cadre de notre démarche MIX’UP, un réseau d’ambassadeurs qui rassemble près de 80 managers volontaires – femmes et hommes – agissant sur le terrain pour lutter contre les stéréotypes de genre.  

À lire : Florence Chappert (Anact) : “Les femmes sont exposées à des risques professionnels invisibilisés et sous-évalués”

Propos recueillis par Caroline de Senneville

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