Malgré une production très limitée et des résultats qui peinent à entrer dans le vert, Tesla s'est imposé en quelques mois comme la première capitalisation boursière de l'automobile. Un engouement qui semble échapper à toute rationalité économique. Mais qui montre que l'avenir du secteur sera d'abord numérique.

Près de 30 000 véhicules sortent chaque mois des usines du groupe Tesla. Soit environ 3,5 % des volumes du groupe Toyota. Le premier a perdu 775 millions de dollars en 2019, le second en a encaissé près de 20 milliards sur l'exercice 2019/2020. Et pourtant, les investisseurs n'ont d’yeux que pour Tesla. Pas tellement pour les performances ou la finition de ses véhicules, mais plutôt par son avance dans les batteries et les logiciels qui les accompagnent.

"Tesla a deux ans d’avance en termes d'architecture informatique et logicielle, ainsi que dans le domaine de la conduite autonome", Markus Duesmann, PDG d'Audi

Si bien que le groupe pourrait davantage être classé parmi les géants de la tech, plutôt qu’au nombre des constructeurs automobiles. "Tesla a deux ans d’avance en termes d'architecture informatique et logicielle, ainsi que dans le domaine de la conduite autonome", reconnaît le PDG d'Audi, Markus Duesmann, qui espère développer une nouvelle voiture électrique autonome d'ici 2024.

Avantage aux nouveaux acteurs

Les constructeurs traditionnels font cependant face à d'importants freins à la digitalisation de leur activité. Le passé des voitures non connectées et des anciens sites de production, robotisés, mais pas encore au niveau de l'usine 4.0 dirigée par l'intelligence artificielle, est complexe à gérer. Le groupe Volkswagen estime qu'il lui faudra encore cinq ans pour intégrer sa nouvelle plateforme logicielle baptisée "vw.os" à l'ensemble des modèles produits par ses douze marques automobiles. Une plateforme essentielle pour réaliser d'importantes économies d'échelle et accéder aux données qui lui permettront d'exploiter pleinement l'intelligence artificielle.

D'où l'avantage donné aujourd'hui aux nouveaux acteurs du secteur, comme Tesla ou certains groupes chinois, dont Xiaopeng Motors, soutenu par le spécialiste du e-commerce Alibaba, qui propose lui aussi une nouvelle génération de voiture intelligente. En attendant de rattraper leur retard, les constructeurs automobiles misent de leur côté sur la digitalisation de la supply chain et de la vente. L'enjeu est de produire en temps record des véhicules configurés directement par les clients sur Internet. Audi a même déployé dans ses concessions des configurateurs en réalité virtuelle.

Investir

Mais les groupes traditionnels vont-ils trouver les moyens d'investir les milliards nécessaires pour réinventer complètement leur modèle ? Dans un environnement complexe, la plupart préfèrent passer par des partenariats avec les géants de la tech, afin d'analyser les millions de données produites chaque jour par leur véhicule ou leur usine, et développer ainsi de nouvelles solutions d'intelligence artificielle.

Les unions s'accélèrent également dans le domaine afin d'atteindre la taille critique nécessaire. Ces enjeux sont d'ailleurs bien identifiés en France, où le gouvernement a annoncé en mai des investissements pour favoriser la production du véhicule de demain. Une prise de conscience salutaire pour éviter la sortie de route.

Fabien Nizon

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