La loi Macron et son principe d’éviction des actionnaires a fait l’effet d’une bombe. Mais cet outil a-t-il véritablement vocation à être utilisé, ou est-il au contraire destiné à rester dans les tiroirs ?

Deux mécanismes sont mis en place par cette loi : la dilution forcée, qui donne la capacité à un mandataire ad hoc de voter l’augmentation de capital en lieu et place des actionnaires, et la cession forcée de la participation des actionnaires, au profit des tiers ayant pris l'engagement d'exécuter le plan de redressement. Ces dispositifs sont applicables aux entreprises de plus de 150 salariés dont la cessation d’activité « est de nature à causer un trouble grave à l’économie nationale ou régionale et au bassin d’emploi », et si la possibilité d’une cession totale ou partielle a déjà été envisagée mais écartée.

 

Un moyen de pression face à des actionnaires récalcitrants

Dans les faits toutefois, un tel mécanisme semble complexe à appliquer. Pourquoi ? Parce que s’il y a désaccord sur la valorisation des parts, l’évaluation sera laissée aux mains d’un expert nommé par le tribunal. Or, expertiser prend du temps, surtout lorsqu’il s’agit d’estimer la valeur d’une entreprise en difficultés ! Et quel investisseur accepterait de reprendre une société sans savoir quel prix il devra payer ? Dans le contexte tendu d’une restructuration, l’efficacité économique restera une priorité pour les différentes parties prenantes. « Je pense que le dispositif est inapplicable en l’état », explique Nicolas Laurent, associé restructuring du cabinet Bredin Prat. Même son de cloche pour son confrère, Fabrice Patrizio, associé du cabinet Archers, partage la même analyse : « Il ne s’appliquera pas. » Néanmoins, cet article de la loi Macron est une formidable arme de négociation face à des actionnaires récalcitrants. Ceux-ci sont plus que jamais incités à trouver un consensus dans le cadre d’une procédure de prévention, au risque d’être évincés si une procédure de redressement est amorcée.  Pour le moment, le principe d’éviction des actionnaires n’a pas encore été appliqué sur le terrain. Seule la pratique nous dira quel est le véritable pouvoir que cet article met entre les mains du marché.   

 

CP

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