Être jeune et investir de façon responsable. Un doux rêve longtemps bloqué par des tickets d’entrée bien souvent trop élevés pour la plupart des jeunes actifs. L’application Ismo, lancée en 2020, propose à tout épargnant, et surtout à la nouvelle génération, de placer des petits montants tous les jours dans des ETF ISR. Philippe de Gouville, CEO d’Ismo nous détaille le projet de la fintech qui lève les barrières à l’entrée de l’investissement responsable.

DécideursComment la prise de conscience croissante des enjeux sociétaux et environnementaux peut-elle changer la vision de l’épargne auprès des nouvelles générations ?

Philippe de Gouville. Il y a effectivement une très forte appétence sur des sujets tels que l’environnement ou l’égalité des chances auprès de la nouvelle génération. Les jeunes manquent cependant de conseil et de visibilité sur leurs possibilités d’investissement. Face à ces problématiques, le volet éducationnel est primordial. Notre credo est d’amener les jeunes à épargner autrement, à avoir les bons réflexes d’épargne. Évidemment cela ne signifie pas abandonner des moyens d’épargne pratiques comme le livret A, qui permet de disposer d’une épargne de précaution dans laquelle on peut piocher pour financer des voyages ou un déménagement. Mais au-delà de cela et pour trouver des produits d’épargne plus rémunérateurs, il faut se projeter à long terme, ce qui n’est pas un acte naturel.

"Dès que ces petits montants dépassent les cinq euros, Ismo les place dans des produits d’investissement"

Ismo propose de remédier à cette problématique par le biais de la consommation : lors de chaque dépense effectuée avec la carte ancaire, l’application épargne automatiquement les arrondis à l’euro supérieur (ou plus selon le paramétrage). Il est également possible d’épargner un euro par jour par exemple, mais l’objectif reste le même : que l’épargne soit régulière et indolore. Dès que ces petits montants dépassent les cinq euros, Ismo les place dans des produits d’investissement.

En matière de stratégie d’investissement, comment tenir la promesse entre responsabilité et rentabilité auprès d’une population toujours plus informée?

Lors de la construction de nos portefeuilles d’investissement début 2020, nous avons tout de suite opté pour que toutes les classes d’actifs sur lesquelles nous investissons soient sur des supports ISR ou ESG. Sur nos "profils dynamiques" il y a par exemple 75 % d’ETF socialement responsables. Certains sujets comme l’exclusion de certains secteurs (nucléaire, tabac…) ont tout de suite été très bien intégrés et compris par les épargnants. Quant à d’autres – la notion de "best in class" par exemple –, ils nécessitent un vrai travail d’éducation auprès des jeunes qui sont parfois surpris de voir apparaître certaines entreprises dans nos portefeuilles.

Pour ce qui est de la rentabilité, depuis début 2020 les ETF Actions européennes ISR sont plus performantes que les actions européennes classiques. L’ISR introduit en effet un biais dans les performances car il favorise les valeurs dites "de croissance".

Les jeunes qui se lancent dans des investissements sur du long terme (huit ou dix ans), sont bien conscients que l’avenir est incertain et que les placements "sûrs" de leurs parents ne rapportent plus rien. Nos portefeuilles sont en phase avec cette réalité et offrent un équilibre entre risque et rendement. C’est la raison pour laquelle nous investissons dans les ETF ISR des grandes maisons telles que BlackRock, Lyxor, Amundi et BNP. Nos fonds sont extrêmement peu chargés et font partie des moins chers de la place. Leur TER, c’est à dire le total annuel de tous les frais sur un fonds, dans leur ensemble, se situe entre 0,50 % et 0,70 %.

Quelles sont les prochaines grandes étapes du développement d’Ismo ?

Nous avons lancé le service en septembre 2020 et l’on compte aujourd’hui un peu plus de 20 000 inscrits et une équipe de dix collaborateurs. Le développement technique est assez original : pour pouvoir investir cinq euros dans les fonds, il faut un peu révolutionner le circuit de l’épargne car en général, des montants plus importants sont nécessaires. Nous avons intégré un ensemble de fonctions qui est généralement réservé à d’autres entreprises, comme les dépositaires, pour agir sur toute la chaîne, de la création du compte à l’investissement. Cette capacité va nous permettre d’accueillir plus d’un million de personnes sans difficulté. Nous prévoyons également de recruter, notamment des spécialistes en architecture numérique.

Propos recueillis par Sandy Andrianabiby

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