«Le débat sur la déontologie et l’indépendance souligne la nécessité de préciser les obligations de l’arbitre»
Entretien avec William W. Park, président de la London Court of International Arbitration et profes
Entretien avec William W. Park, président de la London Court of International Arbitration et professeur, Boston University
Décideurs. Quelles sont les spécificités de la London Court of International Arbitration par rapport à d’autres institutions arbitrales ?
William W. Park. Chaque institution a son propre style. Les membres de la LCIA consacrent beaucoup de temps et d’énergie à la mise en valeur de l’arbitrage en participant à dans des colloques scientifiques à travers le monde. Notre revue « Arbitration International » reçoit des contributions de la part d’auteurs et de praticiens de pays différents, tous des spécialistes dont l’autorité est largement reconnue dans leurs domaines respectifs.
Décideurs. Quelles tendances identifiez-vous aujourd’hui dans l’arbitrage international ?
W. W. P. Tant au niveau universitaire que dans ma pratique d’arbitre, j’assiste à un débat autour des questions de la déontologie et de l’indépendance de l’arbitre. La problématique actuelle concerne la définition d’un ensemble de principes relevant du « soft law », qui touchent à la conduite de la procédure arbitrale et qui sont destinés à combler les lacunes laissées par les lois étatiques. Ainsi, des associations internationales telles que l’International Bar Associations (IBA), l’American Arbitration Association (AAA) et la Chambre de commerce Internationale (CCI), tentent d’apporter des solutions. Ces initiatives soulignent le désir, voire la nécessité, de préciser les obligations de l’arbitre. Dans un article récent publié dans Les Cahiers de l’Arbitrage, j’ai réfléchi à l’épineuse question des devoirs de l’arbitre. Le premier consiste à rendre une sentence juste; le second à respecter à tout moment le principe du contradictoire ; et le troisième, inspiré par la notion d’économie de moyens, réside dans la quête d’efficacité tout en assurant une bonne administration de la justice. Comme dans le célèbre roman d’Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires, à ces trois devoirs s’ajoute un quatrième, qui est de rendre une sentence qui sera reconnue partout où une partie doit s’en prévaloir. La mise en œuvre pratique de ces différents objectifs n’est pas toujours facile, en raison des contradictions qui leur sont inhérentes. En guise d’exemple, l’audition de témoins supplémentaires peut aboutir à une meilleure décision mais elle augmentera la durée et le coût de l’arbitrage.
Décideurs. Vous venez d’évoquer deux points fondamentaux: la durée et le coût d’une procédure arbitrale, arguments le plus souvent soulevés par les opposants à l’arbitrage. Quelle est votre position sur ces sujets ?
W. W. P. Bien évidemment, dans la mesure du possible, nous recherchons l’efficacité. Mais poussée à l’extrême, la tentative de diminuer les coûts et les délais peut aussi avoir pour effet de limiter la possibilité pour les conseils de faire valoir leur arguments, ce qui n’est pas un bon résultat. Les hommes d’affaires n’aiment pas les dépenses. Mais ils apprécient moins encore de n’avoir pu suffisamment s’expliquer sur les points controversés d’un litige important.
Décideurs. En France, les professionnels du droit s’interrogent sur l’instauration de la class arbitration, l’arbitrage de groupe, comme alternative à la class action à la française. Que pensez-vous de cette pratique qui a vu le jour aux Etats-Unis ?
W. W. P. L’action de groupe outre-Atlantique suscite des discussions vives dont on constate les enjeux politiques, opposant consommateurs et milieux d’affaires. La complexité du débat tient à deux caractéristiques du système juridique américain : l’absence d’une loi à l’échelle nationale protégeant les consommateurs contre les clauses arbitrales abusives et la présence d’un jury dans les litiges civils. Ceux qui s’inquiètent de la fiabilité des jurys sont enclins à préférer l’arbitrage. La question qui se pose alors dans le cadre de la class arbitration est celle de l’équilibre fragile entre d’une part la légitimité de l’arbitre, fondée sur le consentement éclairé des parties et, d’autre part, le bon déroulement de l’instance afin d’éviter le surcoût et les délais excessifs.
Décideurs. Quelles sont les spécificités de la London Court of International Arbitration par rapport à d’autres institutions arbitrales ?
William W. Park. Chaque institution a son propre style. Les membres de la LCIA consacrent beaucoup de temps et d’énergie à la mise en valeur de l’arbitrage en participant à dans des colloques scientifiques à travers le monde. Notre revue « Arbitration International » reçoit des contributions de la part d’auteurs et de praticiens de pays différents, tous des spécialistes dont l’autorité est largement reconnue dans leurs domaines respectifs.
Décideurs. Quelles tendances identifiez-vous aujourd’hui dans l’arbitrage international ?
W. W. P. Tant au niveau universitaire que dans ma pratique d’arbitre, j’assiste à un débat autour des questions de la déontologie et de l’indépendance de l’arbitre. La problématique actuelle concerne la définition d’un ensemble de principes relevant du « soft law », qui touchent à la conduite de la procédure arbitrale et qui sont destinés à combler les lacunes laissées par les lois étatiques. Ainsi, des associations internationales telles que l’International Bar Associations (IBA), l’American Arbitration Association (AAA) et la Chambre de commerce Internationale (CCI), tentent d’apporter des solutions. Ces initiatives soulignent le désir, voire la nécessité, de préciser les obligations de l’arbitre. Dans un article récent publié dans Les Cahiers de l’Arbitrage, j’ai réfléchi à l’épineuse question des devoirs de l’arbitre. Le premier consiste à rendre une sentence juste; le second à respecter à tout moment le principe du contradictoire ; et le troisième, inspiré par la notion d’économie de moyens, réside dans la quête d’efficacité tout en assurant une bonne administration de la justice. Comme dans le célèbre roman d’Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires, à ces trois devoirs s’ajoute un quatrième, qui est de rendre une sentence qui sera reconnue partout où une partie doit s’en prévaloir. La mise en œuvre pratique de ces différents objectifs n’est pas toujours facile, en raison des contradictions qui leur sont inhérentes. En guise d’exemple, l’audition de témoins supplémentaires peut aboutir à une meilleure décision mais elle augmentera la durée et le coût de l’arbitrage.
Décideurs. Vous venez d’évoquer deux points fondamentaux: la durée et le coût d’une procédure arbitrale, arguments le plus souvent soulevés par les opposants à l’arbitrage. Quelle est votre position sur ces sujets ?
W. W. P. Bien évidemment, dans la mesure du possible, nous recherchons l’efficacité. Mais poussée à l’extrême, la tentative de diminuer les coûts et les délais peut aussi avoir pour effet de limiter la possibilité pour les conseils de faire valoir leur arguments, ce qui n’est pas un bon résultat. Les hommes d’affaires n’aiment pas les dépenses. Mais ils apprécient moins encore de n’avoir pu suffisamment s’expliquer sur les points controversés d’un litige important.
Décideurs. En France, les professionnels du droit s’interrogent sur l’instauration de la class arbitration, l’arbitrage de groupe, comme alternative à la class action à la française. Que pensez-vous de cette pratique qui a vu le jour aux Etats-Unis ?
W. W. P. L’action de groupe outre-Atlantique suscite des discussions vives dont on constate les enjeux politiques, opposant consommateurs et milieux d’affaires. La complexité du débat tient à deux caractéristiques du système juridique américain : l’absence d’une loi à l’échelle nationale protégeant les consommateurs contre les clauses arbitrales abusives et la présence d’un jury dans les litiges civils. Ceux qui s’inquiètent de la fiabilité des jurys sont enclins à préférer l’arbitrage. La question qui se pose alors dans le cadre de la class arbitration est celle de l’équilibre fragile entre d’une part la légitimité de l’arbitre, fondée sur le consentement éclairé des parties et, d’autre part, le bon déroulement de l’instance afin d’éviter le surcoût et les délais excessifs.