Président et fondateur d’Accenta, Pierre Trémolières présente sa solution de rupture, alliant géothermie et intelligence artificielle, pour décarboner les systèmes de froid et de chaleur de l’industrie immobilière.
Pouvez-vous nous présenter Accenta ?
Créée en 2016, Accenta développe une solution de chaufferie et de climatisation bas carbone mêlant géothermie et intelligence artificielle. Un maillon essentiel des objectifs de décarbonation, quand on sait que le bâtiment représente 35% des émissions annuelles de l’humanité et que 75% de ces émissions ont lieu pendant la phase d’exploitation. Concrètement, nous allons forer des trous de 100 à 200 mètres de profondeur et de 12 cm de diamètre dans le sol, dans lesquels nous allons passer des tuyaux en circuit fermé. Cela va nous permettre de nous servir du sol comme d’une unité de stockage thermique, capable de garder la chaleur l’été pour la redistribuer en hiver et inversement de conserver le froid l’hiver, pour le libérer en été. Nos solutions technologiques nous permettent ensuite d’optimiser le pilotage de cette énergie pour l’adapter au plus près des spécificités du bâtiment et de son évolution dans le temps.
"L'isolation de l'enveloppe du bâtiment est à la fois une impasse économique et technique"
Quelles sont les autres solutions disponibles sur le marché pour décarboner la production de froid et de chaleur dans le bâtiment ?
Au rang des solutions concurrentes, on peut citer l’isolation de l’enveloppe du bâtiment qui a le désavantage d’être à la fois une impasse économique et technique. En effet, cela coûte entre 500 et 1 000 euros le mètre carré (pour un coût de construction moyen de 2 200 euros du mètre carré) et plusieurs études montrent une perte de 40% de la capacité à isoler dans les quinze ans suivant la rénovation. Au rythme actuel, on aura requalifié 3,6% du parc en 2050. De l’autre côté, il y a le recours à la biomasse qui constitue une source énergétique intéressante et décarbonée, mais qui ne contribue pas à diminuer la consommation d’énergie et a déjà atteint une forme de plafond de verre. Au sein de la géothermie, au-delà de la technologie par sondes que nous utilisons, il y a aussi la géothermie dite « sur aquifère » qui jouit de performances intéressantes mais qui n’est disponible que pour 15 à 20% des territoires et nécessite de plus gros investissements tout en étant moins stable dans le temps.
En guise de comparaison, notre technologie, fruit d’un programme de recherche de trois ans, permet de diminuer de 80% la consommation énergétique due au chauffage et à la climatisation et de 95% les émissions de CO2 induites, le tout rapidement, à prix maîtrisé, en site occupé, et avec une visibilité sur le long terme.
Pouvez-vous nous présenter quelques projets où vous avez déployé votre solution ?
Nous accompagnons nos clients sur toutes typologies d’actifs. Nous avons ainsi contribué à la réalisation du premier entrepôt neutre en carbone pour Prologis, installé une boucle d’eau tempérée géothermique à très haute performance pour le nouveau siège d’Airbus, réalisé une chaufferie bas carbone pour un industriel… Globalement, nous gérons déjà aujourd’hui plus de 8 millions de mètres carrés.
Quel est votre business model ?
Nous offrons une solution clé en main, de la conception à l’exploitation, en passant par la maintenance. Notre capacité à garantir dans le temps la performance énergétique et carbone du système, nous permet de nous engager sur des Contrats de Performance Énergétique et Environnementale (CP2E), avec des pénalités si nous n’atteignons pas les objectifs. Enfin, si notre solution reste bon marché comparé aux alternatives détaillées plus haut, elle n’est pas forcément accessible à tout un chacun. C’est pourquoi nous proposons de financer l’installation à la place de nos clients, pour nous rembourser sur des contrats de revente de MWh sur le long terme, à l’image de ce qui peut se faire pour les énergies renouvelables.
"La bataille des idées est en passe d'être gagnée. Le plan géothermie du gouvernement doit nous permettre de remporter la bataille industrielle."
Le gouvernement a lancé en début d’année un « plan géothermie ». Est-ce le coup d’envoi pour la structuration d’une filière française ?
La bataille des idées est en passe d’être gagnée : plus personne ne doute du potentiel énorme de la géothermie pour accompagner la décarbonation du bâtiment. Le plan du gouvernement en est le marqueur et doit nous permettre de remporter la bataille industrielle. En effet, si la demande est considérable et ne cesse d’augmenter, nous avons toute une filière à structurer, des professionnels à former, pour mettre en œuvre des solutions scalables.
Quelles sont les prochaines étapes pour Accenta ?
Nous ferons des annonces prochainement. Il est encore un peu tôt pour vous les dévoiler aujourd’hui. Tout ce que je peux vous dire c’est que nous mettons tout en œuvre pour financer notre hyper croissance, avec plus de cent recrutements prévus sur 2023. Rendez-vous dans quelques mois pour plus de détails.
Propos recueillis par Antoine Morlighem