Alors qu’un énième rapport du Giec vient rappeler l’urgence de la transformation forte, résolue, radicale des politiques publiques et économiques vers l’atteinte de nos engagements climatiques, Emmanuel Macron s’entête dans une réforme d’un autre âge.

Une France à l’arrêt, des poubelles qui débordent, prennent feu, et rappellent au passage au fier homo sapiens que sommeille en lui un homo detritus refoulé, un système politique et démocratique aux abois… Tout ça pour repousser de deux ans l’âge de départ à la retraite. Responsabilité économique disent les uns. Toujours les mêmes qui payent, disent les autres. À côté de la plaque, dirons-nous. Car à 62 ou 64 ans, la retraite dans un monde devenu fournaise n’a rien de bien attrayant.

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Impasse

La macronie elle-même ne semblait pas très à l’aise avec l’idée de cette réforme. Tantôt justifiée par la nécessité de dégager des marges d’investissement, notamment dans la transition écologique, tantôt par un rigorisme budgétaire bon ton, dans une période où les taux se tendent. Sans que l’urgence d’un tel projet de loi pour l’équilibre des comptes ne frappe par son évidence. Finalement, le tout donne plutôt l’impression d’un entêtement, comme si, pour paraphraser un célèbre publicitaire, un président qui n’aurait pas fait de réforme des retraites avant la fin de son mandat aurait raté sa vie. Une illisibilité renforcée par un sentiment d’injustice sociale, à l’heure où les grandes entreprises n’ont jamais accumulé autant de profits. Cornerisé, Emmanuel Macron propose une taxe exceptionnelle. Pour toute ambition systémique ou remise en cause politique, il faudra repasser.

Le Giec incite pourtant à l’action, affirmant qu’il n’est pas trop tard, que les solutions sont là, que seule la volonté politique manque. Las. Le Président préfère battre en retraite

Échappatoire

Et pourtant. Et pourtant c’est sans doute la seule manière de sortir par le haut, de générer du consensus, de tracer un chemin clair et commun. Les grandes idéologies politiques du XXe siècle sont mortes. Avec son "en même temps", le macronisme l’a acté sans proposer d’alternatives. Il se contente d’être le dernier survivant d’une époque révolue, régnant seul sur un cimetière, assiégé par des extrêmes qui attendent patiemment qu’il rejoigne à son tour les idoles passées. La transition écologique lui offrait pourtant une voie, un cadre. L’occasion de dépasser les vieux clivages, de présenter un futur désirable, de refonder un pacte économique et social, de revitaliser notre démocratie… et de s’assurer, plus égoïstement, une place dans l’histoire. Mais non. Rien, ou si peu. Le Giec, dans son dernier rapport, incite pourtant à l’action, affirmant qu’il n’est pas trop tard, que les solutions sont là, que seule la volonté politique manque. Las. Le Président préfère battre en retraite.

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Le travail scientifique est fait : "Le Giec pourrait fermer boutique. Pas besoin d'un septième puis huitième rapport. On a fait notre boulot", ne peut que constater le climatologue Pierre Friedlingstein sur Twitter. Quelqu’un pour prendre le relais ? Le pouvoir est trop occupé à éteindre l’incendie qu’il a lui-même allumé, et dont les fumées masquent mal l’ampleur d’un tout autre brasier.

Antoine Morlighem

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