Dessine-moi l’avenir de la formation
60 % des métiers de 2030 n’existent pas encore. Pourtant nous savons déjà comment les collaborateurs s’y formeront… Et ce ne sera pas qu’avec les Mooc. Récemment entrés dans le langage courant, social learning, peer to peer et autres anglicismes n’ont qu’à bien se tenir, sous peine de se faire dépasser par des solutions encore plus innovantes. Au-delà des changements de rythme, de temps consacré et d’environnements d’apprentissage, les méthodes ne sont plus les mêmes. Les grandes entreprises, inspirées par des start-up créatives cassant les codes, donnent l’exemple. Les salariés d’EDF ont été formés aux gestes techniques de la maintenance industrielle avec un casque de réalité virtuelle. Pour Matthieu Fouquet, DRH du groupe Onepoint, « les innovations de demain s’expérimentent déjà aujourd’hui ». Et sur ce point, BMW maintient une longueur d’avance. Les opérationnels utilisent un casque de réalité augmentée pour faire face aux difficultés rencontrées sur le terrain. Les casques sont directement connectés à une plate-forme proposant des conseils personnalisés. « La place de l’apprenant est intégrée dans un univers où il devient l’expérimentateur », s’enthousiasme Nicolas Lozancic, responsable de la stratégie digitale de Speedernet. Ce genre de simulation est aussi en projet chez Unibail-Rodamco. Lunette sur le nez, les collaborateurs visiteront, en totale immersion, les soixante-douze centres commerciaux européens du groupe sans même se déplacer. Autonome, oui, mais pas solitaire : l’apprentissage reste un processus social. Pour Philippe Mérieux, professeur et spécialiste de la pédagogie, « on apprend toujours seul mais jamais sans les autres ». Le barcamp l’illustre parfaitement. Cette méthode en vogue aux États-Unis désigne des ateliers-événements informels où les participants construisent le programme de A à Z : contenu, brainstorming, échange, mise en commun des compétences… Les comptes rendus écrits sont proscrits car les présents sont les seuls privilégiés à profiter de l’expérience. Il s’agit bien là d’une expérience émotionnelle au service de l’apprentissage. L’hypnose suit le même credo. Entre éveil et sommeil, les stagiaires font travailler leurs ressources inconscientes et leurs capacités intellectuelles à leur insu. « Puisque l’hypnose calme l’anxiété et lève les inhibitions, elle facilite véritablement l’apprentissage », appuie Nadia Medjad, docteur en neurosciences. Une approche qui tend à se démocratiser dans la sphère professionnelle. Mais prudence… Avec de telles nouveautés, le succès de la formation dépendra plus de l’appropriation du public et donc de la façon de conduire le changement pour les responsables des ressources humaines, que de l’outil lui-même. Philippe Durance, professeur au Cnam, a bien raison. La valeur principale qui lie l’innovation et la pédagogie « n’est rien d’autre que l’individu et la communauté ».
V. L.