Enfin armés légalement pour diffuser des spots publicitaires vantant les mérites de leurs cabinets, les avocats vont pouvoir se lancer. Ces adeptes de la discrétion imposée par le carcan de leur déontologie ont reçu un coup de pouce du Conseil national des barreaux (CNB) qui leur donne les clés d’une bonne campagne.

Le droit n’est pas une prestation de service comme les autres. Les avocats vont donc devoir faire preuve d’ingéniosité s’ils veulent faire leur promotion tout en respectant le code de déontologie qui les a bien longtemps obligés à agir dans l’ombre. Dorénavant, chaque cabinet peut dorénavant vanter les mérites de sa marque, chaque avocat mettre en avant son expertise et son talent.

 

Nouvelle entreprise

Certains n’ont pas hésité une seconde. Le cabinet de réseau AGN (Agence des nouveaux avocats) s’est rapidement lancé dans la publicité radio et télé, une faculté souhaitée de longue date par les plus innovants d’entre eux. AGN est d’ailleurs à l’origine de l’arrêt du Conseil d’État du 9 novembre 2015 qui a considéré que l’interdiction de la publicité par voie de tracts, affiches, films, radio ou télévision était contraire à la directive européenne 2006/123/CE du 12 décembre 2006 dites « services ». C’est ainsi que l’article 10 du règlement de la profession (RIN) a été modifié.

Pour aider les plus frileux dans cette nouvelle entreprise, le CNB vient de publier un vade-mecum. Toutes les mentions obligatoires (noms, prénoms, coordonnées, toque, etc.) doivent-elles figurer sur un spot radio de quelques secondes ? Un avocat peut-il afficher, par flocage sur sa voiture, son nom et son numéro de téléphone ? Peut-il acheter un espace publicitaire dans un stade, distribuer des tracts ou porter sa robe ? Comment encadrer un publi-reportage ? Est-il possible de mentionner le nom des clients avec leur accord ?

 

Fierté, conviction, enthousiasme et humilité 

Le CNB incite les bâtonniers, formés sur la question, « à concevoir que les avocats n’exercent plus leur métier comme il y a quelques années », débute Pascal Eydoux, président de l’institution, lors de la présentation de l’ouvrage. Et de poursuivre : « Nous exerçons sur un marché concurrentiel et si les avocats veulent conserver leur place, ils doivent être en mesure de la communiquer. Chaque avocat doit pouvoir communiquer sur son rôle et ses spécialités. Le temps où il restait caché dans sa tour d’ivoire est révolu. » Les avocats les plus entreprenants répondent ainsi à une demande du marché : un conseil rapide, à portée de main, spécialisé et aux tarifs transparents. Les professionnels qui développeront les meilleurs outils et le feront savoir pourront faire face aux start-up du droit, sans pour autant trahir leur serment. Le CNB s’en porte garant avec « fierté, conviction, enthousiasme et humilité », rassure son président.

Il n’est pas question de voir apparaître des publicités en quatre par trois vantant les vertus du divorce ou invitant à porter plainte contre l’avocat qui a perdu son procès comme aux États-Unis. Imposée par l’Europe, l’ouverture de la publicité aux professions réglementées se fera dans les règles de l’art.

 

Pascale D'Amore

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