eJust ambitionne de créer une justice privée dématérialisée
EJust participera à l'évolution de la justice. C'est en tout cas ce qu'espère Amiel Feldman, le co-fondateur de la plate-forme. Une idée qui s'installe progressivement dans la tête de l'avocat dès 2012, alors que celui-ci cherche le moyen de se recentrer sur ses fondamentaux. « Je servais finalement mieux mes clients par des conseils de gestion de risque que par une assistance devant les tribunaux. »
« Une justice définitive et sans appel »
En l'espace d'un an, l'homme étudie le projet d'une justice privée, puis s'entoure de deux associés : un financier et un entrepreneur. Le 1er janvier 2016 la plate-forme voit le jour. Encore un site qui cherche à simplifier l'accès au droit, sans toucher au sacrosaint monopole du conseil juridique de l'avocat ? Oui, mais pas que eJust viendrait remplacer les tribunaux classiques. « Nous rendons une justice définitive et sans appel. La procédure judiciaire est profondément réinventée », nous explique celui qui se révèle en véritable businessman du droit. « L'arbitrage privé ne représente que quelques milliers de cas par ans dans le monde, c'est un marché très peu développé, où tout est à faire. »
Des clauses eJust
Différents profils d'arbitres (tous juristes) sont proposés sur le site en fonction de la difficulté du cas. Ainsi les parties pourront par exemple faire appel à de jeunes avocats pour des petits litiges, et à un ancien magistrat pour les cas les plus complexes. Les tarifs oscillent ainsi entre 140 et 600 euros de l'heure. Quant aux règles applicables, ce sont celles de l'arbitrage classique. « La méthodologie est réduite à l'essentiel », explique Amiel Feldman. Mais la réelle innovation est ailleurs, car l'avocat a des projets bien plus ambitieux : insérer des clauses eJust en guise de clause compromissoire dans un maximum de contrats commerciaux. Les parties s'engagent alors en amont à résoudre leurs éventuels conflits via la plate-forme. Et si le doute est permis quant à la viabilité du concept, force est de constater que le succès est au rendez-vous : trois entreprises ont déjà décidé d'insérer des clauses eJust dans différents contrats. « Dans un premier temps, nous visons le BtoB et les entreprises, confie l'avocat, avant de reconnaitre qu'il est encore difficile de parler d'arbitrage pour les contrats de consommation en France. » L'homme dit faire son « travail de lobby » auprès du législateur. Quoi qu'il en soit, ce sont plusieurs dizaines de milliers de contrats qui devraient contenir la clause ejust d'ici la fin 2016, selon les dires d'Amiel Feldman.
60 millions d'euros levés d'ici deux ans
Certain du potentiel de la plate-forme, son co-fondateur voit loin : « Notre modèle d'affaire vise l'Europe ». Le site devrait d'ailleurs prochainement sortir dans une version anglophone. Il sera disponible en Angleterre et en Allemagne en 2017, même si le startupper reconnaît qu'une adaptation sera nécessaire, notamment pour des questions de procédure. « Chaque marché est un investissement considérable », conclut-il. L'homme d'affaire semble en tout cas à la hauteur de ses ambitions, car les trois associés auront déjà levé six millions d'euros au mois de mars, et espèrent en lever soixante d'ici deux ans. Et lorsqu'on lui demande s'il n'est pas un peu optimiste, l'avocat se dit tout simplement « réaliste ».
Capucine Coquand
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Photo : de gauche à droite: Olivier Szymczak, directeur marketing et ventes; Leonardo Gorini, Co-fondateur; Amiel Feldman, président et fondateur, (Christophe Delétraz: co-fondateur).
Crédit : Agnès Colombo